Contrairement aux avertissements, les observations verbales et les lettres de mise au point ne sont pas des sanctions disciplinaires.
Autrement dit,
l’employeur peut y recourir librement, sous réserve d’abus, sans avoir à respecter un quelconque délai de prescription ou des règles de forme particulière, telle la notification écrite.
Textes :
C. trav., art. L. 1331-1
;
Circ. DRT no 5-83, 15 mars 1983
.
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Une observation verbale est-elle une sanction disciplinaire ?
Les observations verbales, auxquelles on peut assimiler les réprimandes, mises en garde, rappels à l’ordre, lettres de mise au point, ne sont pas des sanctions disciplinaires (
C. trav., art. L. 1331-1
;
Circ. DRT, 15 mars 1983
).
Exemple :
un employeur qui demanderait à un salarié d’éviter de recevoir des appels téléphoniques personnels pendant son activité professionnelle n’inflige pas une sanction mais procède à un simple rappel à l’ordre.
Les observations verbales ne constituant pas une sanction, l’employeur peut donc les formuler librement sans avoir à respecter une procédure ni des délais particuliers. Ces observations pourront être utilisées à l’occasion d’une procédure disciplinaire pour des faits de même nature. La sanction sera alors fondée sur la répétition des agissements malgré les remarques déjà faites. Dans l’optique d’un contentieux, l’employeur peut avoir intérêt, pour faciliter la preuve de ces observations, d’adresser celles-ci en présence de témoins, tel le responsable hiérarchique direct.
Il arrive que des observations faites lors d’un entretien informel ou de l’entretien annuel d’évaluation, fassent l’objet d’une consignation écrite. Ce formalisme peut faire craindre la requalification des observations en sanctions. La prudence impose une rigueur de rédaction en se bornant à effectuer un constat neutre des insuffisances relevées et à une invitation à l’accomplissement des tâches correspondant aux fonctions exercées. Dans ce cadre, une telle correspondance devrait être considérée comme une simple lettre de mise au point.
Remarque :
lorsque des observations sont invoquées à l’appui d’une mesure disciplinaire, le salarié a tout intérêt à obtenir la requalification de ces observations en sanction disciplinaire. En effet, une fois sanctionnés par un avertissement, les faits reprochés au salarié ne peuvent plus faire l’objet d’une seconde sanction (voir no 135-70 et s.).
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Quand et comment peut-on notifier un avertissement ?
L’avertissement est le plus souvent prononcé pour une faute isolée, sans conséquence grave pour l’entreprise, ou présentant un caractère excusable (exemples : retard, omission, négligence…). En cas de litige, le juge apprécie la proportionnalité de la sanction à la faute commise.
Exemple :
un salarié avait reçu un avertissement suite à son refus de remplacer un collègue alors qu’il était nécessaire d’assurer le suivi de la production ; la sanction a été jugée proportionnée à la faute commise (
).
L’avertissement se matérialise par une lettre envoyée au salarié ; cette lettre doit être adressée dans un délai maximum de deux mois après que l’employeur ait eu connaissance des faits qu’il estime fautifs ; elle doit indiquer les griefs retenus à l’encontre du salarié (
C. trav., art. L. 1332-1
).
Remarque :
pour prononcer un avertissement, l’employeur n’a pas à suivre la procédure de l’entretien préalable prévue par l’article L. 1332-2 du Code du travail pour les sanctions lourdes (mise à pied, rétrogradation, licenciement disciplinaire, etc.). Néanmoins, s’il décide à titre volontaire de soumettre le salarié à cette formalité, il devra suivre l’intégralité de la procédure prescrite par cette disposition et notamment respecter le délai maximum d’un mois suivant l’entretien pour notifier la sanction, ceci sous peine d’annulation de la sanction (
; voir no 135-80). Il devra également respecter le délai minimum d’un jour franc.
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Comment distinguer une lettre de mise au point d’un avertissement ?
La distinction est importante. En effet, un avertissement est une sanction ; il ne peut donc concerner des faits datant de plus de deux mois (voir no 135-70). Une fois qu’il est notifié, l’employeur ne peut plus prononcer d’autre sanction, un licenciement par exemple car il y aurait alors double sanction pour les mêmes faits, ce qui est interdit (voir no 135-45). Par ailleurs, l’avertissement peut être annulé par le juge si ce dernier l’estime injustifié ou disproportionné à la faute commise. Enfin, l’avertissement ne peut plus être invoqué au bout de trois ans car il est prescrit (voir no 135-70). Toutes ces conséquences, liées à la sanction, ne s’appliquent pas à une lettre de mise au point qui, elle, précisément ne constitue pas une sanction.
Dès lors, lorsqu’un courrier est adressé au salarié, et que le terme « avertissement » n’y figure pas, la question peut se poser de savoir si l’on est en présence d’un avertissement ou d’une simple lettre de mise au point. En cas de conflit, le juge va rechercher l’intention de l’employeur.
Exemples :
dans un courriel électronique, un employeur reprochait à une salariée de ne pas rentrer ses commandes dans l’ordinateur et de ne pas tenir son agenda à jour ; il lui enjoignait de procéder à cette opération, à l’instar de ses collègues, tous les vendredis soir. Pour les juges, ce courrier sanctionnait un comportement fautif et constituait un avertissement. En conséquence, le licenciement pour faute grave prononcé quelques semaines plus tard et fondé sur les mêmes faits a été déclaré sans cause réelle et sérieuse car constitutif d’une seconde sanction appliquée aux mêmes faits (
).
Une lettre d’admonestation reprochant au salarié un acte d’indiscipline et l’invitant à renoncer immédiatement à son attitude de refus systématique d’exécuter les ordres donnés, a été considérée comme un avertissement en raison de son contenu et de son caractère comminatoire ; en conséquence, l’employeur ne pouvait licencier le salarié faute de pouvoir invoquer de nouveaux faits survenus après ce courrier (
).
De même, constitue un avertissement, une lettre de mise en garde contenant une série de reproches et indiquant qu’elle sera portée au dossier de l’intéressé (
). En revanche, le courrier de l’employeur se limitant à relever une insuffisance de travail et à demander une prise en compte des remarques faites ne caractérise pas un avertissement disciplinaire (
Cass. soc., 22 janv. 1991, no 87-42.844
).
Sachez-le :
le salarié qui conteste la sanction infligée peut former un recours devant le conseil de prud’hommes pour en demander l’annulation.