Pour l’exercice de ses attributions économiques, le comité d’entreprise doit bénéficier d’un certain nombre d’informations, certaines devant lui être fournies à échéances régulières. Autrement dit, l’employeur doit fournir au comité d’entreprise des informations régulières ou ponctuelles en matière économique et financière.
Textes :
C. trav., art. L. 2323-7 ; C. trav., art. L. 2323-7-2 ; C. trav., art. L. 2323-7-3 ; C. trav., art. L. 2323-8 à C. trav., art. L. 2323-11 ; C. trav., art. L. 2323-19 à C. trav., art. L. 2323-26.
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Quelles informations doivent être transmises au comité après sa mise en place ?
Après chaque élection du comité d’entreprise, l’employeur dispose d’un délai d’un mois pour lui communiquer une documentation économique et financière écrite qui doit préciser :
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la forme juridique de l’entreprise et son organisation (association, société civile, société commerciale, forme juridique de la société – SA, SARL, SAS, etc.) ;
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les perspectives économiques de l’entreprise telles qu’elles peuvent être envisagées (synthèse des projets importants, des investissements à venir, etc., y compris s’ils ont déjà fait l’objet d’une réunion d’information et/ou consultation) ;
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le cas échéant, la position de l’entreprise au sein du groupe ;
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compte tenu des informations dont l’employeur dispose, la répartition du capital entre les actionnaires détenant plus de 10 % de celui-ci et la position de l’entreprise dans la branche d’activité à laquelle elle appartient (C. trav., art. L. 2323-7).
Le non respect de cette obligation d’information constitue un délit d’entrave (
Cass. crim., 14 nov. 2006, no 05-87.554). Le Code du travail ne précise pas les modalités pratiques de la remise de ces informations. La loi relative à la sécurisation de l’emploi (
L. no 2013-504, 14 juin 2013, JO 16 juin), tout en prévoyant la constitution obligatoire pour l’employeur d’une base de données économiques et sociales constamment accessible aux représentants du personnel (dont le contenu est précisé par le
décret no 2013-1305 du 27 décembre 2013 (JO 31 déc.), voir
no 165-11), ne modifie pas cette obligation spécifique consistant à remettre ces informations dans le délai d’un mois suivant l’élection du comité d’entreprise.
Remarque :
la réélection des anciens membres du comité d’entreprise ne fait pas disparaître l’obligation de l’employeur de remettre ces documents après la nouvelle élection.
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Quelles informations comptables l’employeur doit-il transmettre annuellement au comité d’entreprise ?
Quel que soit l’effectif de l’entreprise, l’employeur doit communiquer chaque année certaines informations comptables au comité d’entreprise. Les obligations sont différentes pour les sociétés commerciales et les autres entreprises.
Dans les sociétés commerciales, le comité reçoit communication :
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de l’ensemble des documents obligatoirement transmis annuellement à l’assemblée générale des actionnaires ou des associés (C. trav., art. L. 2323-8). Les documents transmis sont principalement : les comptes annuels, le rapport de gestion présenté par la gérance, le conseil d’administration ou le directoire, le cas échéant, les observations ou le rapport du conseil de surveillance ainsi que les projets de résolution soumis à l’assemblée. La comptabilité analytique ne figure pas parmi les documents à transmettre au comité d’entreprise car il n’existe pas d’obligation d’élaborer une telle comptabilité pour les entreprises (JO Sénat Q., 3 mars 1983, p. 346) ;
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du rapport du commissaire aux comptes ;
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des documents établis en application des articles L. 232-2, L. 232-3 et L. 232-4 du Code du commerce (C. trav., art. L. 2323-10). Il s’agit d’une situation de l’actif réalisable et disponible, d’une situation du passif exigible, d’un compte de résultat prévisionnel, d’un tableau de financement et d’un plan de financement prévisionnel. Cette obligation s’applique à l’ensemble des sociétés commerciales : sociétés anonymes mais aussi sociétés en nom collectif, SARL, sociétés en commandite (simple et par actions). Ces informations sont réputées confidentielles, et les membres du comité ne peuvent donc pas les diffuser aux salariés, sous peine de sanction (voir no 240-20).
Dans les sociétés non commerciales, le comité reçoit communication des documents comptables établis par l’entreprise, notamment les comptes annuels comportant le bilan et les comptes de résultat (C. trav., art. L. 2323-9). Cette disposition vise en particulier : les associations selon la loi de 1901, les caisses non nationales de sécurité sociale, les sociétés civiles, les associations syndicales, les groupements d’intérêt économique, les coopératives agricoles.
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Le comité peut-il se faire assister pour exploiter l’information économique et financière ?
Oui. Le comité d’entreprise peut faire appel à un expert-comptable rémunéré par l’entreprise (voir nos 150-75 et 150-80). Il peut également convoquer les commissaires aux comptes de l’entreprise pour recevoir leurs explications sur les différents postes des documents communiqués ainsi que sur la situation financière de l’entreprise (C. trav., art. L. 2323-8).
Le commissaire aux comptes est délié du secret professionnel pour ce qui concerne le commentaire des différents postes des documents comptables et la situation de l’entreprise. Il doit cependant se garder de porter un quelconque jugement. Il n’a pas non plus à réaliser un exposé général sur l’entreprise : sa mission consiste à répondre aux questions qui lui sont posées au cours de la réunion du comité pendant laquelle sont examinés les documents comptables (Bull. CNCC 1995, no 98, p. 208).
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Quelles sont les informations annuelles communiquées à titre personnel à chaque membre du comité ?
Les membres du comité ont droit aux mêmes communications et aux mêmes copies que les actionnaires. Ces informations sont délivrées concomitamment à leur transmission aux actionnaires (C. trav., art. L. 2323-8 ; voir no 155-40).
Ce droit d’information bénéficie aux membres titulaires et suppléants du comité.
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Quel est le rôle du comité d’entreprise en cas d’opération de concentration ?
L’opération de concentration s’entend d’une fusion entre deux ou plusieurs entreprises jusque-là indépendantes, ou de la prise de contrôle de l’ensemble ou de parties d’une ou plusieurs autres entreprises, ou encore de la création d’une entreprise commune accomplissant de manière durable toutes les fonctions d’une entité économique autonome (C. com., art. L. 430-1).
Lorsqu’une société fait partie d’une opération de concentration, elle doit réunir son comité d’entreprise au plus tard dans les trois jours à compter de la publication du communiqué de l’Autorité de la concurrence à laquelle l’opération de concentration aura été notifiée (C. trav., art. L. 2323-20). Toutefois, seules les opérations revêtant une certaine importance doivent être notifiées à cette autorité (C. com., art. L. 430-2). Ce sont ces mêmes opérations qui donnent lieu à consultation du comité d’entreprise.
Deux réunions sont nécessaires si le comité fait appel à un expert-comptable (C. trav., art. L. 2323-20). Ce dernier est amené à éclairer le comité sur les conditions de l’opération de concentration. Il doit pouvoir accéder non seulement aux documents de l’entreprise, mais aussi à ceux de toutes les autres sociétés concernées (C. trav., art. L. 2325-37).
Aucun délai n’est imposé entre les deux réunions.
Les comités parties à l’opération de concentration peuvent demander à être entendus par le conseil de la concurrence (C. com., art. L. 430-6).
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Quelles sont les informations qui doivent être transmises au comité d’entreprise en cas d’OPA (offre publique d’acquisition)?
L’offre publique d’acquisition recouvre l’offre publique d’achat et l’offre publique d’échange. Elle donne lieu à une procédure spécifique d’information du comité d’entreprise.
OPA lancée sur l’entreprise
En cas de dépôt d’une OPA portant sur une entreprise, le chef de cette entreprise et l’auteur de cette offre réunissent immédiatement leurs comités d’entreprise respectifs pour les en informer (C. trav., art. L. 2323-21).
Au cours de la réunion du comité de l’entreprise qui fait l’objet de l’offre, celui-ci décide s’il souhaite entendre l’auteur de l’offre et peut se prononcer sur le caractère amical ou hostile de celle-ci. L’auteur de l’offre adresse au comité de l’entreprise qui en fait l’objet, dans les trois jours suivant sa publication, la note d’information visée par l’Autorité des marchés financiers (AMF) et qui contient les orientations en matière d’emploi de l’entreprise auteur de l’offre (C. trav., art. L. 2323-22 ; C. monétaire et financier, art. L. 621-8 IX).
Dans les quinze jours suivant la publication de la note d’information précitée et avant la date de convocation de l’assemblée générale d’actionnaires, le comité d’entreprise est réuni une seconde fois pour procéder à son examen et, le cas échéant, à l’audition de l’auteur de l’offre. Dans ce cas, la date de la réunion doit avoir été communiquée à ce dernier au moins trois jours à l’avance. L’auteur de l’offre peut se faire assister des personnes de son choix. Il présentera au comité sa politique industrielle et financière, ses plans stratégiques pour la société visée et les répercussions de la mise en œuvre de l’offre sur l’ensemble des intérêts, l’emploi, les sites d’activité et la localisation des centres de décision de la société. Il prend connaissance des observations éventuellement formulées par le comité d’entreprise. Le comité peut se faire assister préalablement et lors de la réunion par un expert de son choix, rémunéré par ses soins sur son budget de fonctionnement (C. trav., art. L. 2323-23 ; C. trav., art. L. 2325-41).
ATTENTION :
le Code du travail prévoit l’information du «
comité de l’entreprise qui fait l’objet de l’offre ». Les juges ont élargi cette obligation d’information aux comités des entreprises indirectement concernées par l’opération, quand bien même celles-ci ne sont pas juridiquement affectées. Ainsi, les comités d’entreprise de filiales d’une société objet d’une OPA doivent être informés, au même titre que le comité de leur société mère, dès lors que cette opération a des incidences sur la situation des salariés de ces sociétés (
Cass. soc., 26 oct. 2010, no 09-65.565).
Lancement d’une OPA par l’entreprise
En cas de lancement d’une OPA, l’employeur n’est pas tenu de consulter le comité d’entreprise avant la publication de l’offre. Il doit en revanche réunir le comité dans les deux jours ouvrables suivant cette publication en vue de lui transmettre les informations écrites et précises sur le contenu de l’offre et sur les conséquences en matière d’emploi qu’elle est susceptible d’entraîner (C. trav., art. L. 2323-25).
Aux termes des
articles L. 2323-21 et L. 2323-25 du Code du travail, il faut donc distinguer entre les obligations de réunion du comité d’entreprise de la société visée et de la société initiatrice. Une réponse ministérielle résume la procédure ainsi (
Rép. min. no 00565, JO Sénat 29 nov. 2007) :
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en ce qui concerne la société visée, le comité d’entreprise doit être réuni immédiatement après publication de l’avis de dépôt du projet d’offre sur le site de l’AMF. Il doit également être réuni dans les quinze jours suivant la publication de la note d’information une fois visée par l’AMF. Cette note doit avoir été transmise au comité par la société initiatrice trois jours après sa publication ;
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en ce qui concerne la société initiatrice, celle-ci n’est pas obligée de consulter le comité d’entreprise avant de prendre la décision de déposer un projet d’offre. En revanche, elle doit bien le réunir dans les deux jours qui suivent la publication de l’avis de dépôt du projet d’offre (l’article L. 2323-25 du Code du travail précise ainsi le terme « immédiatement » utilisé indifféremment pour la société initiatrice et la société visée à l’article L. 2323-21 du Code du travail).
Remarque :
si l’entreprise est dépourvue de CE, ce sont les délégués du personnel qui seront consultés. A défaut de délégués du personnel, ce sont les membres du personnel qui seront directement informés. Ces règles sont également applicables en l’absence de CE ou de DP dans l’entreprise qui fait l’objet de l’offre (voir ci-dessus).
Sachez-le :
dans les sociétés par actions, les distributions d’actions aux membres du personnel effectuées en application de la loi n
o 80-834 du 24 octobre 1980 doivent faire l’objet d’une information préalable du comité d’entreprise. La méconnaissance de cette obligation constitue le délit d’entrave (
L. no 80-834, 24 oct. 1980, art. 13, JO 25 oct.).
Mise à jour par bulletin 45, Juin 2014
NOUVELLES ATTRIBUTIONS DU CE EN CAS D’OPA
(L. n° 2014-384, 29 mars 2014, JO 1er avr.).
La loi « Florange » renforce également le rôle du comité d’entreprise en cas d’offre publique d’acquisition (OPA). Ces nouvelles dispositions sont applicables aux OPA dont le dépôt intervient à compter du 1er juillet 2014
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Information du comité d’entreprise lors du dépôt ou de l’annonce d’une OPA
Lors du dépôt officiel d’une OPA, l’employeur de la société sur laquelle porte l’offre (la société cible) est tenu de réunir immédiatement le comité d’entreprise pour l’en informer. Au cours de cette réunion, l’employeur devra dorénavant indiquer si l’offre a été ou non sollicitée. Le comité d’entreprise pourra décider de se faire assister par un expert-comptable rémunéré par l’employeur – les frais de l’expertise étaient jusqu’à présent à sa charge (C. trav., art. L. 2323-23-1 et L. 2325-35).
Désormais, cette réunion du comité d’entreprise pourra avoir lieu en amont du dépôt, dès l’annonce de l’offre. L’employeur auteur de l’OPA pourra ainsi demander à celui de la société cible de réunir le comité d’entreprise dans les deux jours ouvrables suivant l’annonce de l’offre. Dans ce cas, les articles L. 2323-21 à L. 2323-23 du Code du travail s’appliquent, mais les délais courent à compter de l’annonce de l’offre et non du dépôt de celle-ci.
L’auteur de l’offre est également tenu de réunir son comité d’entreprise dans les deux jours ouvrables suivant l’annonce de l’offre, et non sa publication (C. trav., art. L. 2323-25).
En cas de modification significative des informations présentées au comité d’entreprise entre l’annonce et le dépôt de l’offre, l’avis rendu par le comité d’entreprise est caduc. Ce dernier doit être à nouveau réuni dans les deux jours suivant le dépôt de l’offre, et rendre un avis dans les conditions posées par les articles L. 2323-21 à L. 2323-23 du Code du travail.
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Audition de l’auteur de l’offre
Si le comité d’entreprise de la société cible décide d’auditionner l’auteur de l’OPA, cette audition doit se tenir dans un délai d’une semaine à compter du dépôt du projet d’OPA. S’il en a désigné un, le comité d’entreprise peut se faire assister d’un expert-comptable (C. trav., art. L. 2323-21-1).
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Remise du rapport de l’expert-comptable
L’expert-comptable désigné par le comité d’entreprise de la société cible dispose d’un délai de trois semaines à compter du dépôt du projet d’OPA pour rendre son rapport (C. trav., art. L. 2323-22-1). Celui-ci est examiné par le comité d’entreprise lors de la réunion au cours de laquelle il émet son avis sur l’OPA (C. trav., art. L. 2323-23).
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Consultation du comité d’entreprise
La loi Florange introduit une véritable procédure de consultation du comité d’entreprise de la société cible sur l’OPA, et lui reconnaît de ce fait le droit d’émettre un avis. Il est informé et consulté avant que le conseil d’administration ou de surveillance ne rende son avis, afin que ce dernier puisse en tenir compte. Au cours de cette réunion, le rapport de l’expert-comptable est examiné. Le comité d’entreprise peut demander la présence de l’auteur de l’offre. Le comité d’entreprise rend son avis dans un délai d’un mois à compter du dépôt du projet d’OPA. En l’absence d’avis rendu dans ce délai, il est réputé avoir été consulté (C. trav., art. L. 2323-23).
S’il estime ne pas disposer d’éléments suffisants pour rendre son avis, le comité d’entreprise peut saisir le président du tribunal de grande instance, qui statue alors en la forme des référés et en dernier ressort, afin d’obtenir ces informations (C. trav., art. L. 2323-23).
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Droit de suite du CE
En cas de succès de l’OPA, l’auteur de celle-ci doit rendre compte devant le comité d’entreprise de la société cible, les 6e, 12e et 24e mois suivant la clôture de l’offre, de la manière dont il a mis en œuvre les déclarations d’intention et, le cas échéant, les engagements qu’il a pris auprès du comité d’entreprise en matière d’emploi, de maintien des sites d’activité et de localisation des centres de décision (C. trav., art. L. 2323-26-1 A).