Quels sont les éléments de rémunération à prendre en compte ?
La rémunération des heures supplémentaires est calculée sur ce qu’il est convenu d’appeler le salaire de base. Mais, faute de définition légale, l’Administration et la jurisprudence ont dû définir la base de calcul des heures supplémentaires.
L’Administration considère qu’il faut prendre comme base de calcul le salaire effectif de l’intéressé.
Au salaire de base, il faut ajouter toutes les primes inhérentes à la nature du travail.
Sont à inclure, par exemple, les primes de froid, de danger, d’insalubrité, la prime individuelle de rendement.
Sont en revanche à exclure les remboursements de frais professionnels, les primes d’ancienneté et les primes d’assiduité (Circ. DRT no 94-4, 21 avr. 1994).
La
jurisprudence a une position proche de celle de l’Administration puisqu’elle estime que la base de calcul des heures supplémentaires est constituée par le salaire versé en contrepartie directe du travail fourni (
Cass. soc., 29 mai 1986, no 84-44.709 ; Circ. 21 avr. 1994, précitée).
A titre d’exemple sont incluses :
En revanche, une prime d’objectif qui n’est pas liée au rendement individuel du salarié ne peut pas être incluse dans la base de calcul des majorations (
Cass. soc., 29 mai 1986, no 84-44.709).
Comment prendre en compte les éléments de rémunération variable ?
Contreparties directes du travail du salarié, les éléments variables de la rémunération, ainsi que les commissions, entrent dans l’assiette de calcul des heures supplémentaires (
Cass. soc., 17 déc. 1996, no 93-42.003).
En l’absence de précision, le plus équitable, nous semble-t-il, est de faire la moyenne des douze derniers mois ou, pour un salarié en activité depuis moins de douze mois, la moyenne des commissions perçues depuis le début du contrat.
En toute logique, il conviendrait même de ne retenir que les commissions afférentes au travail accompli au cours de cette période, ce qui devrait conduire en cas de décalage de paye, situation la plus fréquente, à exclure les commissions afférentes à la période antérieure et à procéder, le cas échéant, à une régularisation pour tenir compte des commissions afférentes aux douze derniers mois mais payées ultérieurement. En pratique, cela ne présente de réel intérêt qu’en cas d’augmentation sensible du variable. Ce qui n’est pas exclu dans la mesure où le salarié a effectué en dernier lieu des heures supplémentaires.
Faut-il prendre en compte la prime d’ancienneté ?
Cette prime est à exclure de la base de calcul des heures supplémentaires. L’Administration et la jurisprudence ont adopté la même position.
Faut-il prendre en compte la prime d’assiduité ?
Sur ce point, les positions de l’Administration et de la jurisprudence sont divergentes.
L’Administration considère que cette prime n’est pas inhérente au travail et l’exclut de la base de calcul des heures supplémentaires (Circ. 21 avr. 1994, précitée).
Compte tenu des positions de la jurisprudence sur le Smic, on peut se demander si, aujourd’hui, la Cour de cassation n’exclurait pas la prime d’assiduité de la base de calcul des heures supplémentaires et ne rejoindrait pas en conséquence la position administrative.
Faut-il prendre en compte la prime au rendement ou de production ?
L’Administration et la jurisprudence ont adopté une position identique (Circ. 21 avr. 1994, précitée).
Ces primes sont à inclure dans la base de calcul des heures supplémentaires lorsqu’elles récompensent l’intervention directe du salarié dans le travail.
La prime peut alors être individuelle ou collective. Dans ce dernier cas, l’intervention du salarié sur le rendement collectif doit être directe (Circ. min. no 9, 8 juin 1957, BO Trav. 1957, p. 3396).
Est en conséquence incluse la prime annuelle calculée pour chaque atelier en divisant le nombre de mètres de tissu par le nombre d’heures effectuées. Cette prime se rattache directement au travail des ouvriers de l’atelier (
Cass. soc., 29 avr. 1970, no 69-40.263).
Est également exclue la prime dont la partie destinée à récompenser l’effort complémentaire des salariés d’un même service est partagée au prorata des heures de travail fournies sans distinction entre les heures normales et les heures supplémentaires (
Cass. soc., 12 mars 1987, no 84-42.809).
En cas de contestation relative à l’intégration ou non d’une commission sur le chiffre d’affaires encaissé et d’une prime annuelle en fonction des résultats dans la base de calcul des heures supplémentaires dues à un salarié, les juges doivent obligatoirement rechercher si ces éléments de rémunération sont directement rattachées à l’activité personnelle de la salariée. Si oui, ils doivent être pris en compte (
Cass. soc., 23 sept. 2009, no 08-40.636).
Observations :
Dans l’espèce soumise à la Cour, une directrice de magasin percevait en application de son contrat de travail, outre un salaire fixe, une commission sur le chiffre d’affaires encaissé et une prime annuelle en fonction des résultats du magasin dont elle était responsable. Les juges du fond avaient écarté sa demande au motif que « le taux horaire servant de base au calcul de la majoration pour heures supplémentaires ne comprend pas les primes de rendement ». Cet arrêt ne pouvait qu’encourir la cassation dès lors que les juges auraient dû rechercher si la commission sur le chiffre d’affaires et la prime annuelle de résultat étaient directement rattachées à l’activité personnelle de la salariée.
Il convient de souligner que la cassation n’est encourue que parce que les juges n’ont pas effectué cette recherche. Au cas d’espèce, sauf à ce que la salariée soit seule dans le magasin, il parait difficile de considérer que les commissions et la prime annuelle soient la contrepartie directe de son seul travail.
Faut-il prendre en compte la prime de travail du dimanche ou d’un jour férié et comment ?
Certaines de ces primes ou majorations sont calculées à l’heure.
Plus souvent, la majoration ou la prime est calculée par journée (exemple : versement d’une rémunération au moins égale au double de la rémunération normalement due pour une durée équivalente en cas de dérogation, cinq dimanche par an au plus, dans les commerces de détail ; C. trav., art. L. 3132-27).
En présence de telles « primes », comment calculer les majorations pour heures supplémentaires ?
La solution consistant à appliquer la majoration pour heures supplémentaires sur le taux majoré de l’heure effectuée le dimanche ou le jour férié, ou à diviser la majoration journalière par le nombre d’heures réel de la journée pour rétablir une base horaire si elle est favorable au salarié, n’est pas satisfaisante en logique, car elle laisse à penser que les heures supplémentaires ont forcément été effectuées le dimanche. Il convient donc, à notre sens, d’ajouter la majoration pour travail du dimanche ou de jour férié au salaire de base hebdomadaire, de reconstituer un taux horaire nouveau et de calculer ensuite les majorations pour heures supplémentaires sur ce taux horaire reconstitué.
Faut-il prendre en compte les indemnités afférentes à des frais professionnels ?
L’Administration et la jurisprudence excluent de la base de calcul des heures supplémentaires les primes ou indemnités représentatives de frais professionnels (
Cass. soc., 24 févr. 1982, no 79-41.671).
A notamment été exclue une indemnité de panier de nuit, prévue par la convention collective, qui ne constituait pas un élément de salaire mais le remboursement de frais exceptionnels de nourriture, exposés par les salariés au retour de leur travail de nuit (
Cass. soc., 19 janv. 1983, no 80-40.879).
Faut-il prendre en compte les primes liées aux conditions de travail ?
Ces primes sont prises en compte dans la base de calcul car elles sont inhérentes à la nature du travail.
Il peut s’agir par exemple :
En revanche, les primes destinées à rémunérer le caractère pénible résultant de certaines conditions de travail (prime de nuit, prime de rupture de cycle) mais qui ont un caractère forfaitaire sont exclues de la base de calcul des heures supplémentaires (
Cass. soc., 22 juill. 1985, no 82-42.924).
Faut-il prendre en compte les primes forfaitaires englobant les heures supplémentaires effectuées ?
Faut-il prendre en compte le complément différentiel de maintien de salaire ?
La réduction du temps de travail à 35 heures hebdomadaires a eu pour conséquence le versement d’un complément différentiel (ou indemnité différentielle) destinée à maintenir le salaire mensuel en vigueur à l’époque des 39 heures.
Il est communément admis que le complément différentiel doit être considéré comme un salaire assujetti à l’ensemble des cotisations sociales et fiscales. C’est également l’opinion de l’Administration (Circ. MES/CAB/2000 003, 3 mars 2000, fiche no 22). Mais ce salaire mensuel doit-il pour autant être pris en compte pour le calcul du salaire horaire ?
L’Administration (Circ. 3 mars 2000 précitée) a pris nettement position s’agissant du complément différentiel qui était prévu par la loi Aubry II pour la garantie du Smic mensuel. Elle considérait que ce complément ne devait pas être pris en compte dans l’assiette de calcul du salaire horaire.
Concernant le complément différentiel d’origine conventionnel, l’administration donne plutôt une orientation dans un sens identique à celui retenu pour le Smic. Elle s’appuie pour cela sur une décision de la Cour d’appel de Paris d’octobre 1998.
Nous disposons pourtant de décisions de la Cour de cassation rendues à la suite de la réduction du temps de travail de 40 heures à 39 heures par semaine (1982) :
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dans une affaire relative à l’égalité des droits des salariés à temps partiel avec les salariés à temps plein, les juges ont décidé que « l’attribution de la prime dite de compensation destinée à maintenir un salaire base 40 heures équivaut à une augmentation du salaire horaire des salariés à temps plein et que, dès lors, celle-ci doit bénéficier, au prorata du temps de travail, aux employés à temps partiel » (Cass. soc., 15 avr. 1992, no 88-42.199) ;
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une indemnité horaire correspondant à des réductions du temps de travail, calculée en fonction du nombre réel d’heures travaillées dans le mois, et versée en plus de la rémunération de base, doit être considérée comme un complément de salaire qu’il y a lieu d’inclure dans la rémunération servant de base aux majorations de salaire pour heures supplémentaires (Cass. soc., 2 mars 1993, no 89-43.505).
Bien que le mécanisme soit le même aujourd’hui, il est toujours possible, dans un contexte sensiblement différent, que la jurisprudence change de position.
Mais, depuis quelques années, compte tenu de l’orientation prise par la Cour de cassation d’interpréter strictement les textes des conventions collectives, il nous semble tout au plus que la jurisprudence distinguera à l’avenir suivant les accords qui ont prévu clairement ou pas, non seulement la création d’une indemnité différentielle, mais également ses conséquences pour le calcul du salaire horaire.
Quelle est la base de calcul de la rémunération des heures supplémentaires effectuées par les salariés payés à la tâche ou à la pièce ?
Dans ce cas, les majorations sont calculées à partir d’un salaire horaire théorique égal au quotient de la rémunération moyenne mensuelle des douze derniers mois par le nombre d’heures mensuel de travail.
Il en va de même pour le travail au rendement.