La prescription en matière de faute inexcusable est de
deux ans. Elle court :
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—
soit du jour de l’accident ou de la première constatation médicale de la maladie ;
-
—
soit de la cessation du travail ;
-
—
soit du jour de la clôture de l’enquête ;
-
—
soit du jour de la cessation du paiement des indemnités journalières (CSS, art. L. 431-2) ;
-
—
soit du jour de la reconnaissance de l’origine professionnelle de l’accident ou de la maladie (Cass. 2e civ., 29 juin 2004, no 03-10.789).
En revanche, lorsqu’un salarié déjà atteint d’une maladie professionnelle développe une nouvelle pathologie reconnue comme étant d’origine professionnelle sur le fondement d’un élément distinct du même tableau de maladies professionnelles que celui de sa première affection, alors les ayants droit de ce salarié décédé des suites de cette nouvelle pathologie sont recevables à engager une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur dès lors que leur action respecte le délai de la prescription biennale courant à compter de la reconnaissance du caractère professionnel de cette seconde affection (
Cass. 2e civ., 16 juin 2011, no 10-21.419).
La circonstance que le cancer broncho-pulmonaire correspondant à la seconde affection reconnue en 2004 est lié médicalement à la silicose constituant la première affection reconnue en 1970 n’a aucune incidence sur le délai de la prescription biennale applicable à l’action engagée par les ayants droit du salarié décédé en 1995 après la modification du tableau de maladies professionnelles survenue en 2003 (même arrêt).
Cet arrêt semble avoir une portée relativement réduite, mais ce cas de figure est fréquent pour certaines expositions professionnelles. Par exemple, l’on rencontre la même situation pour les victimes de l’amiante qui développent souvent des plaques pleurales longtemps avant de développer d’autres pathologies plus graves liées à l’amiante (cancer broncho-pulmonaire, mésothéliome, etc.), mais dans leur cas il existe également des textes spéciaux portant levée de la prescription, voir no 2082 et s.
Il a été jugé que lorsque l’aggravation (10 février 2003) d’une maladie professionnelle (hypoacousie) antérieurement reconnue (4 février 1998) résulte d’une nouvelle exposition à un risque professionnel du salarié victime, et non de l’évolution spontanée des séquelles de la pathologie, alors le salarié est recevable à engager une action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur relative à cette aggravation sans que ce dernier ne puisse lui opposer le délai de prescription biennal de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur applicable à la maladie professionnelle initiale (
Cass. 2e civ., 17 mars 2011, no 10-14.204).
En l’espèce, il s’agissait d’une pathologie non évolutive dont l’aggravation résultait, selon l’appréciation souveraine des juges du fond, pour moitié d’une nouvelle exposition professionnelle à un bruit lésionnel et pour l’autre moitié du vieillissement naturel de l’oreille du salarié victime. Les juges ont souverainement apprécié les réparations dues à la victime au titre de la faute inexcusable de l’employeur en tenant compte de cette double origine de l’aggravation.
Par principe, l’accident du travail ou la maladie professionnelle n’ouvrent droit à une indemnisation complémentaire pour la victime ou ses ayants droit que lorsque la faute inexcusable de l’employeur est à l’origine de cet accident ou de cette maladie. La Cour de cassation en déduit qu’une simple rechute, qui ne constitue pas un nouvel accident ou une nouvelle maladie, ne permet pas au salarié de bénéficier d’un nouveau délai de prescription pour engager une action en reconnaissance de la faute inexcusable qu’a commise son employeur relativement à la rechute dont il a souffert (
Cass. 2e civ., 13 janv. 2011, no 10-11.875 ;
Cass. 2e civ., 9 déc. 2010, no 09-72.667).
L’interruption de la prescription au bénéfice de l’un des ayants droit produit également ses effets vis-à-vis des autres ayants droit du salarié victime, même s’ils n’ont pas participé à l’acte interruptif initial (
Cass. soc., 24 janv. 2002, no 00-11.696).
a)
Point de départ
La loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription civile (
L. no 2008-561, 17 juin 2008, JO 18 juin) n’a pas affecté le point de départ de la prescription biennale de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.
En effet, le nouvel article 2223 du Code civil précise que les règles de droit commun sont purement supplétives, c’est-à-dire qu’elles « ne font pas obstacle à l’application des règles spéciales prévues par d’autres lois ».
Or, en matière de risques professionnels, ce sont les articles L. 431-2 (accidents du travail), L. 461-1 et L. 461-5 (maladies professionnelles) du Code de la sécurité sociale qui fixent les règles relatives à la durée et au point de départ de la prescription de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.
Selon la Cour de cassation, il résulte de la combinaison de ces textes que «
les droits de la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ou de ses ayants droit aux prestations et indemnités se prescrivent par deux ans à compter, soit de l’accident ou de la première constatation médicale de la maladie, soit de la cessation du paiement de l’indemnité journalière, soit de la cessation du travail, soit de la clôture de l’enquête » (
Cass. soc., 27 avr. 2000, no 98-11.750, Bull. civ. V, no 157).
Toutefois, la preuve de la date à laquelle le salarié a été effectivement informé de la prise en charge de son accident ou de sa maladie au titre des risques professionnels peut poser quelques difficultés qui reporteront le point de départ de la prescription biennale de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable commise par l’employeur.
Par exemple, il a été jugé que les caisses informent le salarié de sa prise en charge au titre des risques professionnels par lettre simple, aucun texte ne leur imposant de procéder à cette information par un moyen permettant de prouver sa date de réception par le salarié. Dans la mesure où aucune preuve ne permet d’établir que le salarié a pris connaissance de cette décision de prise en charge, alors les juges du fond ont souverainement pu estimer que le délai de prescription de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur n’a commencé à courir qu’à compter de la date à laquelle le salarié a été informé de l’attribution d’une rente à son profit au titre de cet accident du travail (5 avril 2005), et non pas à compter la date de la reconnaissance de l’origine professionnelle de son accident (27 octobre 2004). Par conséquent, son action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur (engagée le 30 mars 2007) n’était pas prescrite (
Cass. 2e civ., 17 mars 2011, no 10-14.898).
Lorsque le versement des indemnités journalières est brièvement interrompu par une tentative de reprise du travail, puis qu’il est rétabli dans le cadre d’une prolongation de l’arrêt de travail pris en charge au titre des risques professionnels, alors les juges du fond ne peuvent pas retenir la date de cette interruption du versement des indemnités journalières comme point de départ de la prescription biennale de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable (
Cass. 2e civ., 9 déc. 2010, no 09-69.917).
Lorsque le versement des indemnités journalières a été fait successivement au titre de l’accident du travail puis au titre de l’assurance maladie, c’est la date de cessation du versement des indemnités journalières dues au titre des risques professionnels qui fait courir le délai de la prescription biennale de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable (
Cass. 2e civ., 9 juill. 2009, no 08-15.481).
En l’absence de paiement d’indemnités journalières, le jour de la consolidation de l’état de la victime ne saurait être retenu comme point de départ de la prescription biennale (
Cass. 2e civ., 12 juill. 2012, no 11-17.442).
La Cour de cassation estime que la caisse qui omet de satisfaire à son obligation d’information ne permet pas à la victime, ou à ses ayants droit, de se prévaloir d’une impossibilité d’agir en recherche de la faute inexcusable de l’employeur, dès lors qu’elle a eu connaissance en temps utile de la prise en charge de la maladie par la caisse au titre de la législation sur les risques professionnels (
Cass. soc., 27 avr. 2000, no 98-11.750, Bull. civ. V, no 157).
Dans le cas de contamination par le virus HIV, la Cour de cassation retient que le jour de la révélation de la séropositivité constitue le jour de l’accident à compter duquel court le délai de prescription de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur (
Cass. soc., 15 oct. 1998, no 96-22.127, Bull. civ. V, no 426). Cette interprétation extensive se justifie par le décalage dans le temps entre le jour où se produit la cause de l’accident et le moment où le dommage qui en découle est avéré, voir
no 2057.
Comme le délai de la prescription biennale de l’action du salarié ou de ses ayants droit pour faute inexcusable de l’employeur n’a pu commencer à courir qu’à compter de la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie par la caisse et que seule la victime ou ses ayants droit peuvent se prévaloir de la reconnaissance implicite résultant du retard de la caisse, c’est à bon droit que les juges du fond ont fixé le point de départ de la prescription biennale à la date de la décision explicite de reconnaissance de l’origine professionnelle de la maladie par la caisse primaire (
Cass. 2e civ., 11 oct. 2005, no 04-30.360). Dans cette affaire, la décision explicite de prise en charge est intervenue plus de 16 ans après la déclaration de la maladie professionnelle qui n’a commencé à être instruite qu’au décès du salarié demandeur, survenu 15 ans après ladite déclaration.
En l’absence de certificat médical antérieur, la date de première constatation de la maladie professionnelle, à partir de laquelle se prescrit l’action du salarié en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, est celle du certificat médical joint à la déclaration de maladie professionnelle (
Cass. soc., 26 nov. 2002, no 00-22.877, Bull. civ. V, no 358).
C’est la date effective de cessation du versement des indemnités journalières qui fait courir le délai, peu importe qu’une décision de la caisse et du Tass fixe la consolidation à une date antérieure à cette cessation (
Cass. 2e civ., 18 janv. 2005, no 03-17.564).
b)
Suspension et interruption
Après quelques flottements jurisprudentiels, il est désormais admis que la prescription biennale de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable commise par l’employeur est soumise aux règles du droit commun en matière de report, de suspension et d’interruption (
Cass. 2e civ., 25 juin 2009, no 08-17.546).
Par conséquent, la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription civile (
L. no 2008-561, 17 juin 2008, JO 18 juin) s’applique au décompte de la prescription biennale de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.
La suspension de la prescription en arrête temporairement le cours sans effacer le délai déjà échu (C. civ., art. 2230). En revanche, l’interruption de la prescription efface le délai déjà acquis ; dans ce cas, un nouveau délai de même durée que l’ancien commence à courir avec l’interruption de prescription qui a eu lieu (C. civ., art. 2231).
La Cour de cassation admet que la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ainsi que, le cas échéant, ses ayants droit se prévalent des suspensions (
Cass. 2e civ., 25 juin 2009, no 08-17.546, minorité de l’un des ayants droit) et des interruptions (
Cass. soc., 7 oct. 1987, no 86-11.146, saisine de la caisse primaire aux fins de conciliation assimilée à une demande en justice) de la prescription prévues par le droit commun.
Conformément aux
articles 2234 et suivants du Code civil les causes du report ou de la suspension de la prescription sont :
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—
la survenue de la circonstance à la réalisation de laquelle le droit est subordonné en cas de créance conditionnelle, de créance à terme ou d’action en garantie ;
-
—
l’impossibilité d’agir par suite d’un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure ;
-
—
la minorité, sauf en cas d’émancipation, ou le placement sous tutelle d’un majeur, sauf pour les actions en paiement ou en répétition des salaires, arrérages de rente, pensions alimentaires, loyers, fermages, charges locatives, intérêts des sommes prêtées et, généralement, les actions en paiement de tout ce qui est payable par années ou à des termes périodiques plus courts ;
-
—
le mariage ou la conclusion d’un pacte civil de solidarité ;
-
—
la médiation ou la conciliation ;
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—
la mesure d’instruction ordonnée par un juge en dehors de tout procès.
La prescription est suspendue à compter du jour où, après la survenance d’un litige, les parties conviennent de recourir à la médiation ou à la conciliation, ou encore, à défaut d’accord écrit, à compter du jour de la première réunion de médiation ou de conciliation. Le délai de prescription recommence à courir pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter de la date à laquelle soit l’une des parties ou les deux, soit le médiateur ou le conciliateur déclarent que la médiation ou la conciliation est terminée (C. civ., art. 2238).
La prescription est également suspendue lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d’instruction présentée avant tout procès. Le délai de prescription recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter du jour où la mesure d’instruction a été exécutée (C. civ., art. 2239).
La prescription biennale de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur est soumise aux règles de droit commun, de sorte que son cours est suspendu pendant la minorité des ayants droit de la victime d’un accident du travail conformément à l’article 2252, devenu l’
article 2235, du Code civil (
Cass. 2e civ., 28 avr. 2011, no 10-30.658). Ce même arrêt précise que cette suspension de la prescription biennale ne s’applique qu’aux seuls ayants droit mineurs et non pas aux autres ayants droit majeurs participant à l’action, tels que la mère, veuve du salarié décédé, qui agissait tant en son nom personnel qu’en qualité d’administratrice légale de ses enfants.
Les trois causes d’interruption de la prescription prévues par le Code civil sont (
C. civ., art. 2240 ;
C. civ., art. 2241 et
C. civ., art. 2244) :
-
—
la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait ;
-
—
l’introduction d’une demande en justice ;
-
—
la mise en œuvre d’un acte d’exécution forcée.
Le Code civil précise que l’introduction d’une demande en justice interrompt la prescription, même lorsqu’elle consiste en une action en référé ou lorsqu’elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l’acte de saisine est annulé en raison d’un vice de procédure (C. civ., art. 2241). Cette interruption de prescription produit ses effets jusqu’à l’extinction de l’instance (C. civ., art. 2242). En revanche, cette interruption est considérée comme non avenue si le demandeur se désiste de sa demande, laisse périmer l’instance ou si sa demande est définitivement rejetée (C. civ., art. 2243).
L’acte interruptif de prescription diligenté par un seul des ayants droit de la victime interrompt également le délai de prescription de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable au profit des autres ayants droit (
Cass. soc., 24 janv. 2002, no 00-11.696).
La prescription biennale est interrompue par une action en justice engagée devant un juge incompétent et sur un fondement distinct de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, lorsqu’elle tend au même but que cette dernière au point que l’action en reconnaissance de la faute inexcusable était déjà comprise dans la première (
Cass. 2e civ., 10 janv. 2010, no 09-10.944 ;
Cass. soc., 27 nov. 1980, no 79-13.299).
Lorsqu’un jugement définitif reconnaît la faute inexcusable commise par l’employeur au titre de l’accident du travail dont son salarié a été victime, ce dernier dispose d’un délai de deux ans à compter de la notification de ce jugement pour obtenir les réparations complémentaires des préjudices personnels auxquelles il peut prétendre en raison de cette reconnaissance. Le fait de solliciter la CPAM pour qu’elle organise une tentative de conciliation entre lui et son employeur équivaut à une citation en justice au sens de l’
article 2244 du Code civil et interrompt ce délai de prescription (
Cass. 2e civ., 3 mars 2011, no 09-70.419).
La Cour de cassation a jugé, sous l’empire des anciens textes, que la saisine de la caisse primaire aux fins de conciliation interrompt la prescription biennale de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable commise par l’employeur, puisqu’elle constitue «
un préalable à l’introduction d’une instance contentieuse » ; elle est donc équivalente à une citation en justice (
Cass. soc., 17 juin 1993, no 91-10.762). Le nouveau délai de prescription ne commence à courir qu’à compter de la date de notification du résultat de la conciliation (
Cass. soc., 17 juin 1993, no 91-10.762 ;
Cass. 2e civ., 10 déc. 2009, no 08-21.969).
Dans le même sens, l’initiative de la victime saisissant la caisse primaire d’une requête tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur a été analysée comme équivalant à la citation en justice visée à l’
article 2244 du Code civil et elle interrompt donc la prescription biennale (
Cass. soc., 16 déc. 1993, no 92-10.169, Bull. civ. V, p. 214 ;
Cass. 2e civ., 16 sept. 2003, no 02-30.490).
En outre, le Code de la sécurité sociale prévoit les deux causes suivantes d’interruption de la prescription biennale (
CSS, art. L. 431-2) :
c)
Incidence d’une action pénale
Selon l’
article L. 431-2 du Code de la sécurité sociale :
« Toutefois, en cas d’accident susceptible d’entraîner la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, ou de ceux qu’il s’est substitués dans la direction, la prescription de deux ans opposable aux demandes d’indemnisation complémentaire (…) est interrompue par l’exercice de l’action pénale engagée pour les mêmes faits »
(CSS, art. L. 431-2).
La prescription est interrompue lorsqu’une action pénale est engagée contre l’employeur sur les faits susceptibles d’entraîner la reconnaissance d’une faute inexcusable.
La prescription biennale de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur étant interrompue en application de l’
article L. 431-2 du Code de la sécurité sociale par l’exercice de l’action pénale engagée pour les mêmes faits, cet effet interruptif subsiste jusqu’à la date à laquelle la décision ayant statué sur cette action est devenue irrévocable. La circonstance que les ayants droit du salarié victime dont l’action a été interrompue par l’engagement des poursuites pénales n’aient pas participé à celles-ci et qu’ils n’ont pas été informés du passage en force de chose jugée de la décision ayant statué sur l’action pénale ne permet pas aux juges du fond de considérer que le délai de la prescription biennale n’a jamais recommencé à courir à leur égard (
Cass. 2e civ., 28 avr. 2011, no 10-17.886).
De plus, si l’action en reconnaissance de la faute inexcusable était déjà prescrite, l’engagement de l’action pénale ne permet pas de faire échec à cette forclusion (
Cass. 2e civ., 20 mars 2008, no 06-20.592).
Ne constituent pas l’engagement d’une telle action :
-
—
l’instruction adressée par le procureur à un officier de police judiciaire, dans le cadre d’une enquête préliminaire close par un classement sans suite. La prescription de la demande d’indemnisation complémentaire ne peut donc être interrompue dans ce cas de figure (Cass. 2e civ., 10 juin 2003, no 02-30.318) ;
-
—
les instructions adressées par le procureur de la République à un officier de police judiciaire lors de l’enquête préliminaire, ou les procès-verbaux dressés par l’inspection du travail (Cass. 2e civ., 31 mai 2012, no 11-10.424) ;
-
—
le dépôt d’une plainte entre les mains du procureur de la République (Cass. 2e civ., 31 mai 2012, no 11-13.814).
Cet effet interruptif de l’action pénale subsiste jusqu’à :
Il s’ensuit également qu’un nouveau délai de prescription biennale court à compter du jour où le délai d’appel du procureur général a expiré.
Toutefois, une loi nouvelle n’a d’effet que pour l’avenir, sauf dispositions contraires du législateur et ne peut remettre en cause une prescription définitivement acquise au jour de son entrée en vigueur (
Cass. soc., 31 mars 1994, no 91-11.760, Bull. civ. V, no 122). Ainsi, lorsque le jugement de condamnation pénale de l’employeur est définitif, aucune instance n’étant en cours au moment de la publication de la loi et à défaut d’enquête consécutive à l’accident, le délai de prescription commence à courir à compter du jour de l’accident et expire deux ans plus tard. La procédure de conciliation est en effet intervenue trop tardivement pour qu’elle ait pu le suspendre. En conséquence, les dispositions législatives nouvelles ne peuvent faire revivre une action prescrite avant leur entrée en vigueur (
Cass. soc., 22 juin 1995, no 92-21.509, Bull. civ. V, p. 156).
d)
Prescription de droit commun
L’action de la caisse contre l’employeur, en remboursement des sommes qu’elle a avancées à la victime d’une faute inexcusable en application de l’
article L. 452-3 du Code de la sécurité sociale, est soumise à la prescription de droit commun et non pas à la prescription biennale (
Cass. soc., 19 oct. 2000, no 98-17.811).
Depuis la réforme de la prescription civile de 2008, cette prescription initialement trentenaire a été abaissée (
L. no 2008-561, 17 juin 2008, JO 18 juin) :
-
—
à cinq ans, à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer, lorsque la créance subrogatoire de la caisse porte sur une action personnelle ou mobilière (C. civ., art. 2224) ;
-
—
à dix ans, à compter de la date de la consolidation du dommage initial ou aggravé, lorsque la créance subrogatoire de la caisse porte sur une action en responsabilité née à raison d’un événement ayant entraîné un dommage corporel, engagée par la victime directe ou indirecte des préjudices qui en résultent (C. civ., art. 2226) ;
-
—
à vingt ans, à compter de la date de la consolidation du dommage initial ou aggravé, lorsque la créance subrogatoire de la caisse porte sur une action en responsabilité née à raison d’un événement ayant entraîné un dommage corporel, engagée par la victime directe ou indirecte des préjudices qui en résultent, lorsque ces préjudices ont été causés par des tortures ou des actes de barbarie, ou par des violences ou des agressions sexuelles commises contre un mineur (C. civ., art. 2226).
Mise à jour par lettre d’actualités no 288, Octobre 2013
Action en reconnaissance du caractère professionnel de la maladie – Prescription
En matière de maladies professionnelles, le délai de prescription ne commence à courir qu’à compter du jour où le salarié est informé du rapport possible entre sa maladie et son activité professionnelle, quand bien même il aurait suspecté un tel rapport plusieurs années auparavant.
Une salariée est atteinte d’une fibromyalgie, ayant donné lieu à un certificat médical le 17 juin 2003, mentionnant que la salariée « présente depuis des années des gênes neuromusculaires non étiquetées, diffuses, qu’elle met en relation avec une vaccination ancienne ». Le 11 septembre 2006, un certificat médical constate la maladie et fait le lien avec la vaccination contre l’hépatite B que la salariée, alors aide-soignante, avait été obligée de subir au titre de ses fonctions plusieurs années auparavant.
Retenant le premier certificat médical comme point de départ de la prescription biennale applicable à l’action en reconnaissance du caractère professionnel d’une maladie (CSS, art. L. 431-2), la caisse primaire, suivie par la cour d’appel, déclare irrecevable comme prescrite la demande introduite par la salariée le 14 mai 2007.
Or, le délai de prescription commence à courir le jour de l’accident (CSS, art. L. 431-2), c’est-à-dire, dans le cas d’une maladie professionnelle, à « la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle » (CSS, art. L. 461-1).
Faisant une application littérale de ces dispositions, la Cour de cassation retient que la suspicion d’un lien possible entre sa maladie et son activité professionnelle, relatée par le salarié dans un certificat médical, dès lors que ce certificat n’établit pas lui-même un rapport possible entre les deux, ne fait pas courir le délai de prescription.