a)
Procédure d’opposition
L’exécution de la contrainte peut être interrompue par opposition faite par le débiteur dans les
15 jours à compter de la signification par huissier (
CSS, art. R. 133-3) ou de la notification par lettre recommandée (
CSS, art. R. 612-11, pour les travailleurs indépendants) :
-
—
soit par inscription au secrétariat du tribunal des affaires de sécurité sociale dans le ressort duquel il est domicilié ;
-
—
soit par lettre recommandée avec demande d’avis de réception adressée au secrétariat dudit tribunal.
Tout délai qui expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant (
CPC, art. 642 ;
Cass. soc., 22 juin 1995, no 93-20.419).
L’opposition doit être motivée et accompagnée d’une copie de la contrainte contestée.
Toutefois, le défaut de production d’une copie de la contrainte contestée, à l’appui de l’opposition formée par le débiteur, ne constitue pas un manquement à une formalité substantielle ou d’ordre public et ne peut donc justifier l’annulation de la contrainte (
Cass. soc., 5 avr. 2001, no 99-13.070). De même, la non-production de cette copie dans le délai de 15 jours ne peut entraîner l’irrecevabilité de l’opposition (
Cass. soc., 2 déc. 1999, no 97-18.508).
Dès qu’il a connaissance de l’opposition, l’organisme créancier adresse au secrétariat du tribunal compétent une copie de la contrainte, une copie de la mise en demeure comportant l’indication du montant des cotisations et majorations de retard qui a servi de base à l’établissement de la contrainte, ainsi que l’avis de réception de cette mise en demeure par le débiteur (CSS, art. R. 133-5).
En effet, l’organisme émettant une contrainte pour le recouvrement des cotisations doit justifier de l’envoi préalable de la mise en demeure elle-même, ou la justification de sa notification, devant le tribunal saisi de l’opposition à contrainte formée par le débiteur (
Cass. soc., 15 févr. 1989, no 86-18.354, Bull. civ. V, p. 79).
b)
Recevabilité de l’opposition
L’opposition est recevable même lorsqu’elle est formée à l’encontre de plusieurs contraintes.
L’opposition est irrecevable :
-
—
si elle a été formée avant la signification de la contrainte (TASS Ariège, 26 janv. 1989, somm. SS 1989, no 207, p. 718) ;
-
—
si elle a été formée plus de 15 jours après la signification de la contrainte (Cass. soc., 1er oct. 1992, no 90-20.866 ; Cass. soc., 1er oct. 1992, no 90-20.864) ;
-
—
si elle a été adressée à l’huissier ayant signifié la contrainte (Comm. 1re inst. SS Nantes, 22 mars 1962). Toutefois, il a été jugé que les réclamations précises, explicites et motivées, adressées par l’employeur à l’Urssaf dans les 15 jours qui suivent la signification d’une contrainte, valent opposition à celle-ci, peu importe que l’opposition n’ait pas été adressée au secrétariat du tribunal des affaires de sécurité sociale. En effet, selon le principe général propre au contentieux de la Sécurité sociale posé par l’article R. 142-18 du Code de la sécurité sociale, la forclusion ne peut être opposée toutes les fois que le recours a été introduit dans les délais, soit auprès d’une autorité administrative, soit auprès d’un organisme de sécurité sociale ou de mutualité sociale agricole (CA Paris, 9 janv. 1991) ;
-
—
si elle n’est pas motivée : en effet, l’opposition doit être réellement motivée, et cela par une contestation pouvant porter sur la réalité de la dette, l’assiette et le montant des cotisations, voire sur la prescription de la dette (Cass. soc., 1er oct. 1992, no 90-20.861). Il n’appartient pas à l’auteur de la contrainte d’apporter la preuve de son bien-fondé, mais au cotisant qui fait opposition à la contrainte de rapporter la preuve des éléments présentés au soutien de son opposition (Cass. soc., 16 nov. 1995, no 94-11.079), c’est-à-dire du caractère infondé du redressement de cotisations (Cass. soc., 14 mars 1996, Bull. civ. V, no 99). Le débiteur qui décide de faire opposition à contrainte n’est toutefois pas tenu de développer tous ses moyens dans l’acte saisissant la juridiction contentieuse (Cass. soc., 13 oct. 1994, no 92-13.723, Bull. civ. V, p. 187).
Cependant ne répond pas à l’obligation de motivation le débiteur énonçant simplement « qu’il contestait le montant réclamé » sans autre argument de fait ou de droit (Cass. 2e civ., 23 mars 2004, no 02-31.043).
Toutefois, une contrainte non motivée est recevable, dès lors que l’acte de signification ne mentionne pas que cette opposition doit être motivée sous peine d’irrecevabilité (Cass. 2e civ., 23 mars 2004, no 02-30.119) ;
-
—
si elle est fondée sur le fait que l’organisme chargé du recouvrement n’a pas tenu compte du changement d’adresse du siège social, dès lors que l’employeur n’établit pas avoir informé l’Urssaf de ce changement (Cass. soc., 8 févr. 1996, nos 94-15.245, 94-15.246 et 94-15.247).
c)
Bien-fondé de l’opposition
Une contrainte ne peut être annulée aux motifs que l’organisme défendeur à l’opposition n’a pas comparu et ne soutient pas les éléments qui fonderaient l’émission de l’acte litigieux.
Un tribunal ne peut, pour débouter un cotisant de son opposition à contrainte, invoquer que la créance de l’Urssaf est fondée en son principe et justifiée «
par les pièces produites aux débats et les explications données ». Le tribunal doit en effet préciser et analyser – même de façon sommaire – le contenu des pièces et explications sur lesquelles il a fondé sa décision (
Cass. soc., 28 mars 1996, no 94-13.449).
Les juges ne peuvent pas, pour condamner un ancien gérant, devenu associé d’une société civile, à payer la cotisation d’allocations familiales, énoncer simplement que la personne a bien la qualité d’associé. En effet, la seule qualité d’associé n’impliquant pas nécessairement la réalisation d’un travail au sein de la société, les juges devaient rechercher si l’intéressé exerçait effectivement pendant la période visée par la contrainte une activité non salariée au sein de la société (
Cass. soc., 28 nov. 1996, no 95-10.867).
De même, les juges ne peuvent annuler une contrainte sans indiquer en quoi la prise en compte des dispositions relatives au calcul du salaire minimum par les entreprises d’hôtellerie et de restauration rendait injustifié le redressement (
Cass. 2e civ., 10 juin 2003, no 01-20.837).
À noter que, selon une jurisprudence constante, un tribunal des affaires de sécurité sociale ne saurait, à l’occasion d’une opposition à contrainte, statuer directement sur une demande de remise de majorations de retard. En effet, une telle demande doit être soumise préalablement, après paiement des cotisations, à la commission de recours amiable de l’organisme dont relève le débiteur (
Cass. soc., 12 oct. 1988, no 86-12.358 ;
Cass. soc., 17 déc. 1998, no 97-14.061).
Ainsi doit être cassée la décision d’un tribunal des affaires de sécurité sociale qui, saisi d’une opposition à contrainte portant sur des cotisations et des majorations de retard s’y rapportant, valide la contrainte pour les cotisations mais remet les majorations en raison des circonstances et du cas d’espèce (
Cass. soc., 19 oct. 1988, no 86-16.389 ;
Cass. soc., 19 oct. 1988, no 86-16.391).
En outre, le jugement qui valide une contrainte ne peut statuer sur les majorations de retard correspondant à une
période ultérieure à son prononcé. Par suite, il a été jugé que l’organisme chargé du recouvrement est en droit de décerner postérieurement une seconde contrainte afférente aux majorations de retard complémentaires ayant continué de courir jusqu’au paiement intégral des cotisations correspondantes (
Cass. soc., 11 juill. 1991, no 89-12.142, Bull. civ. V, p. 224).
Enfin, un tribunal ne peut rejeter l’opposition et valider la contrainte en se bornant à énoncer que la somme réclamée correspondait à des majorations de retard afférentes aux cotisations réglées et calculées à titre provisoire, sans tenir compte des versements ultérieurs effectués à des dates précises par le cotisant (
Cass. soc., 26 mai 1994, no 92-12.166).
Selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation, le juge du contentieux de la Sécurité sociale ne pouvait se fonder sur l’
article 1244-1 du Code civil pour accorder des délais de paiement aux débiteurs de cotisations, hors cas de force majeure dûment constaté (
Cass. soc., 22 mars 2001, no 99-18.456) : en vertu des
articles L. 256-4 et R. 243-21 du Code de la sécurité sociale, seuls les organismes de recouvrement ont qualité pour accorder de telles mesures. La Cour de cassation malgré un arrêt isolé dans lequel elle reconnaît cette faculté au juge (
Cass. soc., 19 juill. 2001, no 00-12.917) a, depuis, réaffirmé sa jurisprudence traditionnelle en rappelant que cette possibilité ne lui est accordée qu’en cas de force majeure (
Cass. 2e civ., 29 juin 2004, no 02-31.106).