L’accident du travail et la maladie professionnelle doivent faire l’objet d’une déclaration de la part du salarié-victime et de l’employeur. Toutefois, l’absence de déclaration ne fait pas obstacle à l’application du régime des accidents du travail.
Autrement dit,
si déclarer un accident du travail ou une maladie professionnelle est une obligation, elle ne conditionne pas de manière automatique leur reconnaissance par la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM).
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Qui a le pouvoir de constater un accident du travail ou une maladie professionnelle ?
La constatation de l’accident du travail relève d’un constat de fait opéré par un médecin. L’accident du travail est donc constaté par la victime elle-même, le médecin intervenant éventuellement par la suite ne se prononce que sur l’arrêt de travail qui peut en résulter. Au contraire, la maladie professionnelle doit faire l’objet d’une décision du médecin qui peut être le médecin traitant.
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Comment déclarer un accident du travail ?
La victime d’un accident du travail doit, dans la journée où l’accident s’est produit ou au plus tard dans les 24 heures sauf cas de force majeure, d’impossibilité absolue ou de motif légitime, en informer ou en faire informer l’employeur ou l’un de ses préposés soit de vive voix, soit par lettre recommandée (
CSS, art. L. 441-1
;
CSS, art. R. 441-2
).
La déclaration peut également être faite par la victime à la CPAM dont elle relève, jusqu’à l’expiration de la seconde année qui suit l’accident (
CSS, art. L. 441-2
). Un double est alors envoyé par la caisse à l’employeur, «
à qui la décision est susceptible de faire grief par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception
» (
CSS, art. R. 441-11
;
). Depuis le 1er janvier 2010, l’employeur peut dans ce cas émettre des réserves motivées (
).
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Comment déclarer une maladie professionnelle ?
En cas de maladie professionnelle, le salarié avise la caisse primaire dans les 15 jours suivant la cessation de travail (
CSS, art. L. 461-5
). Un double de sa déclaration est envoyé à l’employeur («
par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception
»,
) et au médecin du travail (
CSS, art. R. 441-11, al. 3
), mais non le certificat médical remis par le salarié (
). Depuis le 1er janvier 2010, l’employeur peut émettre des réserves motivées (
).
Lorsqu’il s’agit de déclarer une maladie professionnelle récemment reconnue, l’assuré dispose d’un délai de trois mois à compter de la date d’entrée en vigueur du nouveau tableau pour saisir la caisse (
CSS, art. L. 461-5
;
CSS, art. R. 461-5
).
Le non-respect de ces délais ne prive pas le salarié du droit à réparation, dès lors qu’il fait valoir ses droits dans un délai de deux ans partant du jour où un certificat médical constate un lien possible entre la maladie et l’activité professionnelle ou du jour de la cessation du travail (
CSS, art. L. 431-2
).
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Auprès de qui un travailleur intérimaire doit-il déclarer un accident du travail ou une maladie professionnelle ?
Il doit déclarer son accident à l’entreprise utilisatrice dans les 24 heures par lettre recommandée, si la déclaration n’a pas été faite à celle-ci ou à son préposé sur les lieux de l’accident (
CSS, art. L. 412-4
;
CSS, art. R. 412-1
). Il doit également en informer l’entreprise de travail temporaire, dans le même délai. L’entreprise utilisatrice doit, dans les 24 heures, informer l’entreprise de travail temporaire par lettre recommandée, ainsi que le service de prévention de la CRAM et l’inspection du travail (
CSS, art. R. 412-2
).
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L’employeur doit-il lui-même déclarer l’accident du travail ?
L’employeur ou l’un de ses préposés doit déclarer tout accident dont il a eu connaissance par lettre recommandée avec AR ou par Internet (
www.net-entreprises.fr
) dans les 48 heures (non compris les dimanches et les jours fériés), à la CPAM dont relève la victime (
CSS, art. L. 441-2
;
CSS, art. R. 441-3
). Ce délai court non pas à compter du jour de l’accident, mais seulement à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance (
). La déclaration papier est réalisée sur un imprimé que l’on peut se procurer auprès des caisses de sécurité sociale. L’employeur en conserve l’un des volets et adresse les trois premiers à la caisse primaire du lieu de résidence habituelle de la victime. Cette obligation doit être respectée, qu’il s’agisse d’un accident du travail proprement dit, d’un accident de trajet ou d’un accident n’ayant pas donné lieu à arrêt de travail. En cas de maladie professionnelle, l’employeur n’a pas d’obligation de déclaration, celle-ci revenant uniquement au salarié.
Remarque :
l’employeur doit conserver, pendant cinq ans, les copies des déclarations d’accidents du travail déclarés à la CPAM (
C. trav., art. D. 4711-3
;
).
En vertu de l’article L. 471-1 du Code de la sécurité sociale, la CPAM a la possibilité de réclamer à l’employeur qui ne respecte pas ses obligations relatives à la déclaration des accidents du travail et à la remise de la feuille d’accident à la victime le remboursement des dépenses qu’elle a engagées.
Cet article est complété par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 (
L. no 2009-1646, 24 déc. 2009, JO 27 déc.
) pour ouvrir la possibilité aux directeurs de l’organisme local d’assurance maladie de prononcer à l’égard des employeurs qui n’ont pas respecté leurs obligations déclaratives, en sus de «
l’indu correspondant à la totalité des dépenses faites à l’occasion de l’accident
», les pénalités financières visées à l’article L. 162-1-14 du Code de la sécurité sociale.
Cette possibilité pour le directeur de CPAM de prononcer des pénalités financières est également prévue en cas d’accident du travail survenant à un travailleur étranger en situation irrégulière.
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En cas de doute sur le caractère professionnel de l’accident, l’employeur peut-il refuser de procéder à une déclaration ?
Non. L’employeur ne dispose, à l’égard de l’accident, d’aucun pouvoir d’appréciation. Il peut seulement, le cas échéant, en contester le caractère professionnel et assortir sa déclaration de réserves. Ainsi, lorsqu’un salarié est victime d’une lésion corporelle survenue au temps et au lieu de travail et immédiatement portée à la connaissance de l’employeur, celui-ci doit en faire la déclaration, quelle que soit son opinion sur les causes de l’accident (
CSS, art. L. 441-2
).
Exemple :
un employeur ne peut omettre de déclarer le malaise cardiaque d’un salarié survenu sur le lieu de travail au motif qu’il était dû à son état préexistant. En ne déclarant pas cet accident, le chef d’entreprise commet une faute et prive le salarié d’une chance d’être pris en charge par la CPAM (
CSS, art. L. 432-1 et s.
). La victime peut alors demander des dommages et intérêts (
).
En cas de défaut ou de retard dans la déclaration, la CPAM est fondée à demander à l’employeur le remboursement de la totalité des dépenses occasionnées par l’accident (
CSS, art. L. 471-1
). La CPAM peut réexaminer le bien-fondé de la sanction prise à l’encontre de l’employeur et décider éventuelement d’une annulation totale ou partielle. Le tribunal des affaires de sécurité sociale peut se prononcer sur l’existence du retard de l’employeur par la caisse et vérifier l’affectation des sommes réclamées à l’employeur. Il peut également apprécier le montant de la sanction prononcée au regard de la gravité du manquement commis par l’employeur (
;
Cass. 2e civ., 8 avr. 2010, no 08-02.906
;
). Ainsi, les juges peuvent se prononcer sur l’adéquation entre une sanction consistant dans le remboursement de l’intégralité des dépenses engagées par la CPAM pour un accident du travail et le seul retard de 5 jours de l’employeur dans la déclaration de l’accident.
Enfin, le salarié victime d’un accident du travail non déclaré peut demander à l’employeur des dommages-intérêts (
).
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Dans quel délai la caisse doit-elle statuer sur le caractère professionnel de l’accident ou la maladie ?
Actuellement, la CPAM dispose d’un délai de 30 jours à compter de la date à laquelle elle a eu connaissance de la déclaration de l’accident. Ce délai est de trois mois à compter de la déclaration pour les maladies professionnelles (
CSS, art. R. 441-10
). Faute de décision dans ces délais, le caractère professionnel de l’accident ou de la maladie est établi.
Depuis le 1er janvier 2010,
le point de départ du délai est la date de réception par la caisse de deux documents : la déclaration d’accident du travail (ou la déclaration de maladie professionnelle) et le certificat médical initial (
).
La CPAM doit appeler l’employeur à participer à l’enquête administrative complémentaire éventuellement diligentée dans le cadre de la procédure de reconnaissance (
CSS, art. R. 441-11
) ; il en va de même si, lors de la déclaration, l’employeur a émis des réserves sur les circonstances de temps et de lieux de l’accident ou sur l’existence d’une cause totalement étrangère au travail ; la caisse devra mener une enquête et informer l’employeur de son déroulement (
). Lorsqu’elle se contente d’aviser l’employeur de sa contestation initiale puis de sa décision finale de prise en charge et d’attribution de rente, elle ne satisfait pas à son obligation d’information ; en conséquence, sa décision est inopposable à l’employeur (
). Or, en cas de faute inexcusable, la CPAM dont la décision de prise en charge est inopposable ne peut récupérer sur l’employeur les compléments de rente et les indemnités versées par elle au salarié (
; voir no 155-60).
Remarque :
lorsque la CPAM procède à des investigations sur les circonstances ou la cause de l’accident ou de la maladie, par questionnaire ou enquête auprès de l’employeur et de la victime, elle doit depuis le 1
er janvier 2010, et afin de garantir le caractère contradictoire de la procédure, informer les parties (l’employeur et la victime ou ses ayants droit), au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, sur les éléments de l’enquête susceptibles de leur faire grief, mais également sur la possibilité qui leur est offerte de consulter le dossier (
;
CSS, art. R. 441-14
). Cette information est faite «
par tout moyen permettant d’en déterminer la date de réception
» (par exemple par lettre recommandée avec AR ou écrit électronique).
Sachez-le :
l’employeur est par ailleurs passible d’une amende de 750 € au plus en cas de non-déclaration ou de retard (
CSS, art. R. 471-3
).