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353-10 Quelles sont les modalités d’organisation plurihebdomadaire du temps de travail pouvant être mises en place par accord collectif ?

Partie 3 –
Optimiser, organiser et gérer
Thème 353 –
Organisation plurihebdomadaire du temps de travail
353-10 Quelles sont les modalités d’organisation plurihebdomadaire du temps de travail pouvant être mises en place par accord collectif ?
La loi no 2008-789 du 20 août 2008 a significativement simplifié les modalités d’aménagement plurihebdomadaires du temps de travail en créant un dispositif unique qui se substitue aux dispositions antérieures relatives à la modulation (voir no 353-85), à l’annualisation par attribution de JRTT (voir no 353-90), au travail par cycle (voir no 353-80) et au temps partiel modulé (voir no 375-40).

Il s’agit de permettre aux entreprises de mettre en place par accord collectif des modalités d’organisation, comportant des variations de durée hebdomadaire, vraiment adaptées à leurs besoins.

Sachez-le :À défaut d’accord, il est également possible de répartir librement l’horaire collectif sur une période plurihebdomadaire, mais dans un cadre plus rigide et limité à quatre ou neuf semaines, selon que l’effectif de l’entreprise est ou non inférieur à 50 salariés (C. trav., art. D. 3122-7-1 ; voir no 353-20).

La loi a maintenu en vigueur les accords ayant mis en place les anciens types d’organisation, conclus antérieurement à son entrée en vigueur (L. no 2008-789, 20 août 2008, art. 20 V). Ceux-ci continuent à s’appliquer dans les conditions prévues par la législation antérieure (Circ. DGT no 20, 13 nov. 2008, fiche no 11).

La Cour de cassation a jugé que cette « sécurisation » ne bénéficiait pas aux accords qui n’ouvrent que la possibilité d’organiser le travail par cycle, sans l’imposer, et qui renvoient à la négociation d’accord locaux (Cass. soc., 13 juin 2012, no 11-12.191, no 11-17.110 P+B). Cette solution est, selon nous, transposable aux anciens accords-cadres relatifs à la modulation, aux JRTT et au temps partiel modulé.

Pour que, par ailleurs, l’accord soit sécurisé, celui-ci doit être conforme aux dispositions légales applicables antérieurement (C. trav., ancien art. L. 3122-3). À défaut, l’employeur ne peut pas s’en prévaloir (Cass. soc., 16 déc. 2014, no 13-14.558, à propos d’une répartition du travail par cycles). La seule exception concerne le défaut de programme indicatif (L. no 2016-1088, 8 août 2016, art. 12, IV).

Dans quels cas doit-on passer par un accord collectif ?

La mise en place d’une organisation plurihebdomadaire du temps de travail sur une période supérieure à quatre semaines ou neuf semaines et au plus égale à l’année, ou trois ans, nécessite la conclusion d’un accord collectif (C. trav., art. L. 3121-44).

Sachez-le :Le Comité européen des droits sociaux a, dans une décision du 18 octobre 2018, considéré que la possibilité d’aménager le temps de travail sur une période supérieure à l’année et au plus de trois ans n’était pas compatible avec la Charte sociale européenne au motif :

  • d’une part, qu’il s’agit d’une période déraisonnable qui n’est justifiée ni par des motifs objectifs ou techniques, ni par des raisons tenant à l’organisation du travail ;
  • d’autre part, que le salarié serait privé, en raison de la longueur de la période, d’une rémunération équitable au sens de l’article 4-2 de la Charte.

Même si cette décision n’a pas d’effet contraignant en droit interne, l’État français pourrait être amené à modifier sa législation. D’autant plus qu’elle pourrait inciter des salariés à saisir les prud’hommes de demandes de rappel de salaire (CEDS, 18 oct. 2018, réclamation no 154/2017, CGT c/ France, publiée le 15 mars 2019).

Ceci étant, à ce jour, seule la convention de branche de la métallurgie autorise le recours à une pluri-annualisation du temps de travail. Le nombre d’entreprise pouvant faire l’objet d’un éventuel contentieux devrait donc être limité.

Ne sont pas concernées les entreprises qui fonctionnent en continu. Ces modalités d’organisation peuvent dans ce cas résulter directement d’une simple décision unilatérale de l’employeur (C. trav., art. L. 3121-46). Celui-ci doit néanmoins consulter, au préalable, le CHSCT et le comité d’entreprise, ou le CSE ou le conseil d’entreprise (voir no 560-10 et s.).

Sachez-le :Attention à ne pas faire de confusion. Ce n’est pas le travail en continu qui peut être mis en place unilatéralement. C’est uniquement l’aménagement plurihebdomadaire du temps de travail. La mise en place du travail continu dans les industries et entreprises industrielles, pour des raisons économiques, est en effet toujours subordonnée à l’existence d’un accord collectif (convention ou accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, accord de branche étendu ; voir no 330-30) l’autorisant, ou, à défaut, à une autorisation de l’inspecteur du travail (C. trav., art. L. 3132-14). Cette exigence d’un accord collectif ou, à défaut, l’autorisation de l’inspecteur du travail n’a pas lieu d’être lorsque l’entreprise bénéficie d’une dérogation permanente de droit au repos dominical.

Sous cette réserve, et à défaut d’accord collectif, les entreprises n’ont accès qu’à un dispositif permettant d’aménager le temps de travail à l’intérieur d’une période de quatre ou de neuf semaines (voir no 353-20).

Comment s’articulent en la matière les dispositions négociées au niveau de l’entreprise avec celles fixées par la convention collective de branche ?

C’est désormais en priorité au niveau de chaque entreprise que peuvent être négociées les modalités d’aménagement plurihebdomadaires du temps de travail. Lorsqu’il porte sur une période supérieure à l’année, ce mode d’organisation doit toutefois être autorisé par un accord de branche et lui seul (C. trav., art. L. 3121-44, al. 1, 1o).

Sachez-le !La fixation de la période (limitée à un an) sur laquelle porte l’aménagement plurihebdomadaire du temps de travail fait partie des domaines où les dispositions conventionnelles de branche priment sur celle conclues dans l’entreprise (C. trav., art. L. 2253-1).

La convention ou l’accord d’entreprise peut toutefois lui substituer des garanties au moins équivalentes, sans que l’on sache très bien ce qu’elles peuvent concrètement recouvrir. En revanche, la fixation d’une période de référence supérieure à l’année relève de la compétence exclusive de la branche.

Sous ces réserves, les dispositions de la convention collective de branche n’ont qu’un caractère subsidiaire. Ce n’est donc qu’à défaut de convention ou d’accord d’entreprise ou d’établissement abordant le sujet que les règles fixées par la convention collective de branche s’appliqueront.

Exit le principe de faveur. Il est donc possible de fixer par convention d’entreprise des dispositions différentes, voire moins avantageuses pour les salariés que celles fixées par la convention collective de branche.

Sachez-le !La référence à l’accord d’entreprise englobe celui conclu au niveau de l’établissement. Il en va de même pour ceux qui le sont au niveau d’une UES, puisque, selon la jurisprudence, cette dernière constitue une entreprise. Rappelons par ailleurs que, depuis la loi no 2016-1088 du 8 août 2016, l’ensemble des négociations prévues au niveau de l’entreprise peuvent être engagées et conclues au niveau du groupe (C. trav., art. L. 2232-33). De plus, s’agissant de l’accord interentreprises, au regard de sa place dans le Code du travail (C. trav., Livre II, titre V, chap. III bis), nous pouvons considérer que celui-ci a également la même valeur qu’un accord d’entreprise et qu’il est donc possible de mener des négociations à ce niveau-là. Voir no 510-10.

Enfin, lorsque la loi renvoie à la convention collective de branche, il n’est plus nécessaire que celle-ci soit étendue. La seule exception concerne le travail intermittent (C. trav., art. L. 3121-33).

  • Sur la consultation préalable des représentants du personnel et leur suivi de l’accord, voir no 560-10.

Que doit contenir l’accord collectif aménageant le temps de travail sur plusieurs semaines ?

Le contenu obligatoire de l’accord collectif mettant en place la nouvelle organisation plurihebdomadaire est allégé par rapport à ce qui était auparavant prévu pour la modulation, les cycles, le temps partiel modulé et l’annualisation sous forme de JRTT.

Il s’inspire en grande partie des anciennes dispositions relatives à la modulation (C. trav., art. anciens art. L. 3122-9 à L. 3122-18), en laissant une grande liberté aux partenaires sociaux pour fixer ses modalités d’application.

L’accord doit désormais seulement fixer (C. trav., art. L. 3121-44) :

  • la période de référence sur laquelle s’applique l’organisation plurihebdomadaire.Celle-ci peut être inférieure à l’année. Elle est en principe annuelle sans pour autant coïncider nécessairement avec une année civile. Il peut selon nous s’agir d’une période invariable de 12 mois consécutifs, adaptée aux nécessités de l’entreprise : période de 12 mois correspondant à l’exercice fiscal, aux variations de l’activité, aux dates d’acquisition des congés payés, etc.

    Sous réserve qu’un accord de branche l’autorise, et de sa conformité avec le droit de l’Union, cette période de référence peut être supérieure à l’année, sans toutefois dépasser trois ans (voir observation ci-dessus) ;

  • les conditions et délais de prévenance des changements de durée ou d’horaires de travail À défaut de stipulation conventionnelle, le délai de prévenance en cas de changement de durée ou d’horaires est fixé à sept jours (C. trav. art. L. 3121-47).Sachez-le. À défaut de précision, il semble s’agir de jours calendaires et non pas de jours ouvrés.

    Il semble possible de prévoir des délais de prévenance différents selon l’ampleur du changement d’horaire et selon qu’il s’agit d’une modification à la hausse ou à la baisse.

    En ce qui concerne les conditions de changement de durée ou d’horaire, cela recouvre, selon nous, aussi bien les circonstances dans lesquelles ces modifications peuvent intervenir, que les modalités pratiques d’information des représentants du personnel et des salariés ;

  • les limites pour le décompte des heures supplémentaires.Sachez-le. L’accord peut prévoir une limite annuelle inférieure à 1 607 heures.

    En revanche, ce seuil ne peut pas être augmenté. Dans le cas contraire, toutes les heures accomplies au-delà de ce seuil légal restent néanmoins des heures supplémentaires (Cass. soc., 17 déc. 2014, no 13-13.505).

    La fixation d’un seuil conventionnel de déclenchement plus élevé n’affecte pas pour autant la validité de l’accord collectif concerné (arrêt précité). L’aménagement du temps de travail qui en résulte reste donc applicable. Dans l’affaire soumise à la Cour, l’accord fixait une durée annuelle de 1 820 heures tenant compte des congés payés et des jours fériés. Lorsque ceux réellement pris étaient inférieurs au nombre initialement prévu, il en résultait donc un dépassement du seuil de 1 607 heures, ce qui devait donc donner lieu au paiement d’heures supplémentaires.

    Bien que cette décision concerne un accord de modulation conclu avant la loi no 2008-789 du 20 août 2008, elle est selon nous transposable aux organisations plurihebdomadaires négociées ultérieurement.

    Ce plafond de 1 607 heures s’applique également même si la profession bénéficie d’un régime d’heures d’équivalence (Cass. soc., 26 sept. 2012, no 11-14.083 ; sur cette question, voir no 353-85).

    Ce seuil peut en revanche être abaissé.

    Sachez-le. À défaut de fixation expresse d’un seuil de déclenchement des heures supplémentaires en deçà de 1 607 heures, le fait que la durée annuelle de travail soit inférieure n’emporte pas à lui seul le déclenchement des heures supplémentaires au-delà de la durée conventionnelle de travail (Cass. soc., 13 nov. 2014, no 13-10.721).

    Ce qui vaut pour la fixation du plafond annuel s’applique également au seuil plurihebdomadaire et infra-annuel de déclenchement des heures supplémentaires ;

    L’accord peut par ailleurs fixer un plafond hebdomadaire de déclenchement des heures supplémentaires. Celui-ci est en revanche obligatoire lorsque la période de référence est supérieure à un an. Dans ce dernier cas, la rémunération de ces heures supplémentaires doit être payée avec le salaire du mois considéré ;

  • les conditions de prise en compte, pour le calcul de la rémunération des salariés, des absences (voir infra) ainsi que des arrivées et des départs en cours de période ;
  • lorsque les modalités d’aménagement plurihebdomadaires s’appliquent aux salariés à temps partiel, les modalités de communication au salarié et de modification de la répartition de la durée et des horaires de travail (voir no 375-45) ;
  • le lissage éventuel de la rémunération et ses modalités, en prenant en compte les majorations pour heures supplémentaires consécutives au dépassement des limites hebdomadaires fixées par l’accord.

Il n’est en revanche plus obligatoire de préciser ou de fixer dans l’accord :

  • les données économiques et sociales justifiant l’application d’une modulation ;
  • la répartition, fut-elle indicative, de la durée du travail d’une semaine à l’autre et à l’intérieur de la semaine ;
  • les limites hebdomadaires à l’intérieur desquelles la durée du travail peut varier, ni, s’agissant des salariés à temps partiel, la durée minimale de travail journalière, hebdomadaire ou mensuelle ;
  • les modalités de recours à l’activité partielle (ancien chômage partiel) et au travail temporaire en cas de modulation de la durée du travail ;
  • des contreparties à accorder aux salariés lorsque le délai de prévenance à respecter, en cas de modification d’horaire, est fixé à moins de 7 jours.

Bien que le Code du travail ne l’impose pas, il est recommandé de définir dans l’accord :

  • les unités de travail et les salariés concernés ;
  • les modalités selon lesquelles la durée du travail est décomptée (en d’autres termes, ce qui entre dans le travail effectif, le nombre de semaines ou de jours pris en compte pour le calcul de la durée collective du travail, etc.) ;
  • l’incidence sur le décompte des heures supplémentaires de droits supplémentaires à congés payés liés à l’ancienneté, à l’âge ou à la situation familiale ;
  • le cas échéant, les modalités d’acquisition, de prise et de rachat des repos accordés pour compenser les périodes hautes et, si un CET a été mis en place, les conditions pour y transférer ces jours ;
  • en cas d’annualisation sous forme de JRTT, le sort des jours de repos non pris (voir no 353-90) ;
  • toutes les règles applicables en cas d’absence, d’exercice incomplet ou de droit à congés payés insuffisant, sans se limiter aux incidences sur la rémunération. Peuvent notamment être abordées les incidences en matière de décompte des heures supplémentaires, l’interdiction de récupération des absences et leurs modalités de valorisation, etc.Sachez-le. Il est particulièrement conseillé d’aborder dans l’accord les conséquences des absences sur le décompte des heures supplémentaires. À défaut, la Cour de cassation considère que les heures correspondantes doivent être déduites du seuil de déclenchement des heures supplémentaires sur la base de la durée hebdomadaire moyenne de travail (Cass. soc., 13 juill. 2010, no 08-44.550) ;
  • l’incidence sur le décompte des heures supplémentaires de droits supplémentaires à congés payés liés à l’ancienneté, à l’âge ou à la situation familiale ;
  • le principe d’un alignement de la période d’acquisition des droits à congés payés sur l’exercice annuel d’aménagement du temps de travail ;
  • les modalités de suivi de l’organisation ;
  • en cas de temps partiel, la limite de recours aux heures complémentaires, en la portant, le cas échéant, au-delà de 10 % sans dépasser un tiers de l’horaire contractuel (C. trav., art. L. 3123-20), ainsi que les modalités et les amplitudes de variation des horaires d’une semaine à l’autre ;
  • les modalités de recours à des intérimaires en cas de modulation de la durée du travail.

Les partenaires sociaux peuvent s’inspirer pour ce faire, et selon le cas, des solutions appliquées dans le cadre de l’ancienne modulation (voir no 353-85), de l’ancien temps partiel modulé (voir no 375-40) et de l’ancienne annualisation avec attribution de JRTT (voir no 353-90).

Sur le contenu de l’accord pour permettre le décompte des heures supplémentaires dans un cadre annuel, voir no 353-85.

Indépendamment des dispositions spécifiques relatives à l’organisation plurihebdomadaire du temps de travail, l’accord doit, bien entendu, comporter l’ensemble des autres clauses imposées par le Code du travail telles que :

  • son champ d’application (C. trav., art. L. 2222-1) ;
  • un préambule présentant de manière succincte ses objectifs et son contenu (C. trav., art. L. 2222-3-3) ;
  • ses conditions de suivi et une clause de rendez-vous (C. trav., art. L. 2222-5-1) ;
  • les modalités de son renouvellement ou de sa révision (C. trav., art. L. 2222-5) ;
  • les modalités de sa dénonciation (C. trav., art. L. 2222-6).

Faut-il consulter les IRP ?

Depuis la loi no 2015-994 du 17 août 2015, il n’est plus nécessaire de consulter le CSE ou le conseil d’entreprise ou le comité d’entreprise avant la conclusion d’une convention ou d’un accord d’entreprise d’aménagement plurihebdomadaire du temps de travail (C. trav., art. L. 2312-14). Mais ce projet d’organisation doit dans certains cas faire l’objet, en amont, d’une consultation du CSE ou du conseil d’entreprise ou, dans les entreprises n’ayant pas mis en place l’une de ces deux institutions, du comité d’entreprise et du CHSCT (voir no 560-10).

La consultation de ces instances reste obligatoire lorsque cette organisation plurihebdomadaire est mise en place par accord de branche d’application directe.

Sachez-leLorsqu’elle est obligatoire, l’absence de consultation des représentants du personnel ne semble pas faire obstacle à l’application de l’accord. Cette irrégularité permet seulement aux instances concernées « d’obtenir la suspension de la procédure, si elle n’est pas terminée ou, à défaut, la réparation du préjudice subi à ce titre ». Cette solution appliquée au travail de nuit (Cass. soc., 8 nov. 2017, no 16-15.584) est selon nous transposable aux aménagements plurihebdomadaires du temps de travail.

Par la suite, le comité doit par ailleurs être consulté périodiquement sur le suivi de cette modalité d’organisation dans le cadre de ses attributions sur la durée du travail (C. trav., ancien art. L. 2323-6 ; C. trav., ancien art. L. 2323-15 ; C. trav., art. L. 2312-8 ; C. trav., art. L. 2312-17).

L’aménagement plurihebdomadaire du temps de travail résultant d’un accord collectif s’impose-t-il aux salariés ?

La Cour de cassation a considéré que l’application de systèmes d’annualisation ou de modulation du temps de travail, pourtant prévus par accord collectif, modifiait les contrats de travail (Cass. soc., 23 sept. 2009, no 07-44.712 ; Cass. soc., 28 sept. 2010, no 08-43.161).

Pour faire échec à cette jurisprudence, l’article L. 3121-43 du Code du travail précise que la mise en place d’une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine, prévue par un accord collectif, ne constitue pas une modification du contrat de travail à temps complet.

En d’autres termes, la mise en place d’une organisation plurihebdomadaire du temps de travail ne nécessite pas, en principe, l’accord exprès des salariés.

Tout dépend toutefois de la date de mise en œuvre effective du dispositif.

Cette disposition a été introduite dans le Code du travail par la loi no 2012-387 du 23 mars 2012. Or, selon la Cour de cassation, cette loi n’a ni caractère interprétatif, ni effet rétroactif. Elle n’est donc applicable qu’aux mises en œuvre effectives intervenues après sa date de publication, soit après le 24 mars 2012 (Cass. soc., 25 sept. 2013, no 12-17.776 : s’agissant d’un accord de modulation), et ce quelle que soit la date de signature de l’accord.

En revanche, dès lors que l’accord aura été appliqué à des salariés antérieurement au 24 mars 2012, l’exigence d’un accord individuel préalable des intéressés s’impose.

  • Sur la portée de ces dispositions et leur application dans le temps, voir no 403-10.
  • Sur la régularisation du défaut d’accord des salariés, se reporter aux préconisations que nous proposons pour la modulation, lesquelles sont transposables aux organisations plurihebdomadaires résultant d’accords négociés avant l’entrée en vigueur de la loi du 22 mars 2012 (voir no 353-85).

Sachez-le :Avant l’ordonnance no 2017-1385 du 22 septembre 2017, un accord collectif « à majorité qualifiée » pouvait par ailleurs modifier temporairement les rémunérations, la durée du travail et son aménagement, lorsque l’entreprise était confrontée à de graves difficultés économiques ou pour préserver et développer l’emploi. Les salariés qui refusaient pouvaient être licenciés pour motif économique individuel.

Il a été remplacé par l’accord de performance collective. L’objet de cet accord est de notamment répondre aux besoins de fonctionnement de l’entreprise ou de préserver, ou de développer, l’emploi en :

  • aménageant la durée du travail, ses modalités d’organisation et de répartition ;
  • aménageant la rémunération ;
  • déterminant les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l’entreprise.

Les stipulations de l’accord sont applicables autant aux salariés à temps plein qu’à temps partiel et se substituent de plein droit aux clauses contraires et incompatibles de leur contrat de travail, y compris en matière de rémunération, de durée du travail et de mobilité professionnelle ou géographique interne à l’entreprise (voir no 403-10).

Ce nouveau dispositif coexiste avec celui prévu par l’article L. 3121-43 du Code du travail (L. no 2012-387, 23 mars 2012), lequel n’est opposable qu’aux salariés à temps plein (voir ci-dessus).

Quelles formes peut prendre l’aménagement plurihebdomadaire du temps de travail ?

Les partenaires sociaux peuvent organiser la durée du travail comme ils l’entendent.

Ils peuvent « faire varier la durée de travail hebdomadaire sur plusieurs semaines, sur tout ou partie de l’année ou encore aménager une durée du travail à temps partiel selon les besoins et contraintes de l’entreprise et des salariés » (Circ. DGT no 20, 13 nov. 2008, fiche no 11).

Ils peuvent, pour compenser les périodes hautes, autoriser ou imposer la prise de jours ou d’heures de repos ou seulement envisager une alternance de périodes hautes et basses, voire combiner les deux.

S’ils envisagent une annualisation du temps de travail sous forme d’attribution de jours de repos, il n’est plus obligatoire que ceux-ci compensent uniquement le nombre d’heures hebdomadaires comprises entre 35 et 39 heures. Les seules limites résultent désormais du respect des durées maximales de travail.

Ils peuvent limiter, ou non, les amplitudes hebdomadaires.

Ils peuvent aussi se contenter d’appliquer le mécanisme de droit commun de décompte des heures supplémentaires.

Ils peuvent enfin se contenter d’aménager les anciennes modalités d’organisation en maintenant tout ou partie des anciens JRTT. Il est ainsi possible de réviser l’accord d’annualisation sous forme de JRTT afin que les dates de prise de l’ensemble des jours de repos soient fixées à la seule initiative de l’employeur ou encore de les fractionner ou de les convertir en heures.

L’aménagement plurihebdomadaire du temps de travail peut-il être individualisé ?

Selon la Direction générale du travail, rien ne s’oppose à ce qu’un accord collectif mette en place un aménagement plurihebdomadaire du temps de travail « s’appuyant sur des durées de travail différentes selon les salariés » (Lettre DGT, 22 sept. 2009, adressée par Jean-Denis Combrexelle à Me Sylvain Niel). Autrement dit, contrairement à l’ancienne modulation, il ne semble plus nécessaire que les horaires individuels suivent en même temps, à la hausse ou à la baisse, des variations d’activité.

Sachez-le :Il est vrai que ces alternances de périodes hautes et basses étaient inhérentes à la notion même de modulation. Or, le dispositif issu de la loi du 20 août 2008 n’y fait plus référence. Il autorise désormais un aménagement plurihebdomadaire du temps de travail, indépendamment de toute variation d’activité.

Il reste qu’il semble toujours s’agir d’un mode collectif d’organisation du temps de travail. À ce titre, il convient donc, selon nous, qu’il s’applique à un collectif de travail (une même unité de production, un même service) et non à un individu isolé. Mais sa déclinaison peut varier d’un salarié à l’autre.

Dans la lettre précitée, le directeur général du travail ajoute que : « l’accord collectif pourra préciser la manière dont la programmation des durées de travail et des horaires applicables sur une base individuelle ou collective est déterminée et communiquée. À défaut de précision conventionnelle spécifique sur cette question, l’employeur devra, en application de l’article D. 3171-5 du Code du travail, procéder à l’affichage du nombre de semaines que comporte la période de référence retenue par l’accord collectif et, pour chaque semaine incluse dans cette période de référence, l’horaire de travail et la répartition de la durée du travail. L’affichage des changements de durée ou d’horaire de travail sera réalisé en respectant le délai de prévenance retenu par l’accord collectif ou, à défaut, un délai de 7 jours ouvrés.

Par ailleurs, l’article D. 3171-13 du Code du travail prévoit la remise au salarié d’un document annexé au dernier bulletin de paye de la période, sur lequel figure le nombre total d’heures effectuées depuis le début de la période de référence ».

Doit-on réduire la durée du travail ?

Il n’est pas obligatoire que l’organisation plurihebdomadaire s’accompagne d’une réduction de la durée du travail appliquée jusqu’à présent dans l’entreprise ou l’établissement. La durée annuelle du travail peut rester identique. Elle peut même être augmentée.

Peut-on annualiser le temps de travail sur plus de 1 607 heures ?

Le carcan des 1 607 heures que ne devaient pas dépasser les dispositifs d’annualisation du temps de travail ayant été supprimé, il est possible d’organiser le temps de travail sur une base annuelle supérieure à 1 607 heures. Les heures accomplies au-delà de 1 607 heures sont toutefois de plein droit des heures supplémentaires, y compris en présence d’un régime d’équivalence (voir no 353-85).

Les seules limites à respecter sont :

  • la durée maximale hebdomadaire moyenne sur une période de 12 semaines consécutives (de 44 heures à 46 heures, selon le cas) et la durée maximale absolue de 48 heures par semaine ;
  • les congés légaux ;
  • et le chômage du 1er mai.

La durée collective annuelle de travail peut donc en théorie atteindre 2 041 heures.

Il semble également possible, selon nous, d’annualiser le décompte de la durée du travail sans pour autant que cela s’accompagne d’une variation des horaires hebdomadaires de travail. Un doute subsiste néanmoins sur ce point et l’administration n’aborde pas la question.

Comment se décomptent les heures supplémentaires ?

Dans le cadre d’une organisation plurihebdomadaire négociée du temps de travail, sont décomptées comme des heures supplémentaires (C. trav., art. L. 3121-41) :

  • les heures effectuées au-delà de 1 607 heures annuelles ou de la limite annuelle inférieure fixée par l’accord, déduction faite, le cas échéant, des heures supplémentaires effectuées au-delà de la limite haute hebdomadaire éventuellement fixée par l’accord et déjà comptabilisées.Ce seuil de décompte annuel, ou plurihebdomadaire, des heures supplémentaires englobe les heures d’équivalence applicables dans la profession (Cass. soc., 26 sept. 2012, no 11-14.083). Il ne peut donc pas être augmenté pour en tenir compte. Sur cette question, voir no 353-85 ;

    Sachez-le. En supposant que la journée de solidarité correspond à un jour férié anciennement chômé, le seuil de 1 607 heures équivaut approximativement à : (365 jours – 104 jours de repos hebdomadaire – 25 jours de congés payés – 6 à 7 jours fériés ne tombant pas pendant un repos hebdomadaire) = (229 à 230 jours) × 7 heures = entre 1 603 et 1 610 heures.

    Il en résulte qu’il risque d’être systématiquement dépassé en cas de droit à congés payés incomplet (voir ci-dessous) et lorsque le nombre de jours fériés chômés est inférieur à 6 ou à 7 ;

  • les heures effectuées au-delà de 39 heures par semaine (C. trav., art. D. 3121-25) ;
  • les heures effectuées au-delà de la moyenne de 35 heures calculée sur la période de référence fixée par l’accord, déduction faite des heures supplémentaires effectuées au-delà de 39 heures ou de la limite haute hebdomadaire fixée, le cas échéant, par l’accord et déjà comptabilisées.

Sachez-le. À la lettre de l’article D. 3121-25, ces deux derniers modes de calcul ne concernent que les organisations plurihebdomadaires dont la période de référence est inférieure ou supérieure à un an.

Sachez-le :Pour valider le décompte des heures supplémentaires dans un cadre autre que celui de la semaine, la Cour de cassation veille à ce que les modalités d’aménagement appliquées correspondent bien à l’un de ceux autorisés par la loi. Elle a ainsi considéré que les dispositions de la CCN des cabinets d’experts-comptables (négociées avant la loi no 2008-789 du 20 août 2008) n’instauraient pas, à elles seules, une annualisation du temps de travail permettant un décompte des heures supplémentaires au-delà du seul seuil annuel de 1 596 heures (Cass. soc., 24 avr. 2013, no 11-28.691 ; voir no 353-85).

Elle a jugé dans le même sens s’agissant d’une modalité d’organisation qui, contrairement à ce que prétendait l’employeur, ne répondait pas à la définition du cycle (Cass. soc., 8 nov. 2017, no 16-15-584).

Il convient également que les prescriptions de l’accord collectif soient respectées, telles par exemple l’établissement d’une programmation indicative communiquée aux salariés, après consultation des représentants du personnel, au moins sept jours avant le début de la période sur laquelle est calculé l’horaire (Cass. soc., 2 juill. 2014, no 13-14.216).

Peut-on prévoir le lissage de la rémunération ?

Comme pour les anciennes modulations et les organisations du travail par cycle, il peut être prévu, par convention ou accord d’entreprise (d’établissement ou d’UES ou de groupe ou interentreprises), ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche, que les salariés perçoivent chaque mois la même rémunération, et ce indépendamment des variations d’horaire (C. trav., art. L. 3121-44).

L’accord doit fixer la base de calcul de cette rémunération, laquelle peut être de 35 heures, d’une durée moindre ou plus importante.

Les heures excédentaires exécutées au-delà de 39 heures ou de la limite hebdomadaire conventionnelle doivent en principe être payées avec le salaire du mois considéré. Bien que l’article L. 3121-44 du Code du travail ne semble l’imposer qu’en cas d’organisation plurihebdomadaire portant sur une période de référence supérieure à un an, les accords collectifs systématisent ce paiement immédiat, et ce conformément aux dispositions de l’article L. 3122-5 ancien du Code du travail.

  • Sur la technique du lissage, voir nos 620-10 et 620-20.

Quelles sont les incidences des absences ?

L’article L. 3121-44 du Code du travail impose à l’accord collectif, mettant en place l’organisation plurihebdomadaire, de prévoir les conditions de prise en compte des absences pour le calcul de la rémunération.

Il peut être décidé, à l’exemple de ce qui est prévu dans le cadre de l’organisation plurihebdomadaire limitée à quatre ou neuf semaines (C. trav., art. D. 3121-25 ; voir no 353-20), qu’en cas d’absence rémunérée le temps non travaillé n’est pas récupérable et que, pour le calcul de son indemnisation, celui-ci est valorisé sur la base du temps qui aurait été travaillé si le salarié avait été présent, heures supplémentaires comprises.

Il est conseillé d’adopter quasiment la même règle pour les absences non rémunérées. Les retenues pour absences doivent, selon nous, être strictement proportionnelles à la durée de l’absence en tenant compte de l’horaire programmé au cours de la journée ou de la ou des semaines concernées, et ce par analogie aux règles applicables à l’ancienne modulation (voir no 353-85).

En cas d’aménagement du temps de travail comportant des variations de l’horaire hebdomadaire, il est par ailleurs recommandé de rappeler que le salarié est, à son retour, soumis au même horaire que les autres. Autrement dit, s’il a été absent au cours d’une période haute, il bénéficie comme les autres des périodes basses. Cela vaut que l’absence du salarié soit ou non rémunérée.

Il convient également d’envisager les conséquences des absences, rémunérées ou non, sur le décompte des heures supplémentaires et, le cas échéant, sur l’acquisition des jours de repos destinés à compenser des périodes hautes. À défaut de dispositions conventionnelles particulières, celles-ci ne sont pas assimilées à du temps de travail effectif. Elles n’ont pas à être comptabilisées dans les heures ouvrant droit, au cours de la semaine concernée ou en fin d’exercice, aux compensations pour heures supplémentaires. Elles n’ouvrent en principe pas droit aux repos compensant les périodes hautes, sauf s’il s’agit de jours fixes imposés à l’ensemble des salariés.

S’agissant de l’incidence des absences sur le seuil de déclenchement des heures supplémentaires, la Cour de cassation a considéré, dans un premier temps, à propos d’un accord de modulation muet sur ce point, que l’employeur n’est pas tenu de traiter les heures d’absence intervenues en période haute comme des heures de travail ouvrant droit à des heures supplémentaires, mais que ces heures d’absence impliquent pour l’entreprise d’abaisser le seuil de déclenchement des heures supplémentaires de la durée de l’absence (Cass. soc., 13 juill. 2010, no 08-44.550 ; voir no 353-85). Dans la mesure où il s’agissait, dans cette affaire, d’un arrêt de travail d’origine médical, cette décision peut s’expliquer par l’interdiction des discriminations liées à l’état de santé du salarié. La Cour de cassation a par la suite adopté une solution inverse concernant un congé sans solde (Cass. soc., 9 févr. 2011, no 09-42.939). Il s’agissait de déterminer le taux de rémunération des heures dépassant le temps que le salarié aurait dû effectuer en application de l’accord de modulation. Ce dépassement avait été rémunéré pour partie en heures supplémentaires et pour partie en heures normales sans majoration. Le salarié estimait que toutes les heures devaient être rémunérées en heures supplémentaires et qu’il n’était pas possible d’imputer sur ces heures celles qui correspondaient aux absences pendant la période de modulation. Les juges du fond, qui ont appliqué la majoration pour heures supplémentaires à l’ensemble des heures dépassant la durée annuelle prévue par l’accord de modulation, sont censurés par la chambre sociale : les absences, hormis celles qui seraient légalement, conventionnellement ou par usage, assimilées à du temps de travail effectif au sens de la durée du travail, viennent en déduction des heures de dépassement et retardent d’autant le déclenchement des heures supplémentaires.

Sachez-le :Les partenaires sociaux peuvent, le cas échéant, s’inspirer des dispositions de l’alinéa 4 de l’article L. 3121-41 du Code du travail pour traiter cette question. Elles précisent en effet que constituent également des heures supplémentaires, « les heures effectuées au-delà de la moyenne de 35 heures calculée sur la période de référence ». Si ces dispositions ne concernent que les organisations infra-annuelles ou supra annuelles du temps de travail, rien n’interdit d’adopter, dans l’accord collectif, le même mécanisme pour le traitement des absences en cours d’exercice annuel. En pratique, il convient dans ce cas de diviser par le nombre de semaines effectivement travaillées, le nombre total des heures effectuées pendant cette période.

Quelle peut être l’incidence du travail pendant un jour férié chômé ?

La Cour de cassation a considéré qu’en cas de modulation ou d’annualisation du temps de travail, la prise en compte des jours fériés pour la fixation de la durée collective annuelle de travail ne privait pas les salariés, ayant travaillé un jour férié, du repos équivalent accordé par la convention collective (Cass. soc., 21 mars 2012, no 10-23.841 ; voir no 134-20).

Quelle est l’incidence des entrées et des départs en cours d’exercice ?

L’accord collectif doit prévoir les conditions de prise en compte, pour la rémunération, des arrivées et des départs en cours de période (C. trav., art. L. 3121-44).

Il peut être décidé d’appliquer le mécanisme imposé par l’article D. 3121-25 du Code du travail pour l’organisation plurihebdomadaire limitée à quatre ou neuf semaines (voir no 353-20), ou lorsque la période de référence est inférieure ou supérieure à un an. En cas d’entrée ou de départ en cours d’exercice les heures supplémentaires sont alors décomptées dans un cadre hebdomadaire et le salarié ouvre donc droit aux contreparties y afférentes, en cas d’heures effectuées au-delà de 35 heures, peu importe « qu’elles compensent » des périodes basses. Il peut par ailleurs être décidé, par référence au même texte, que le salaire sera maintenu au cours des semaines basses sur une base de 35 heures (ou de la durée moyenne).

Une autre technique peut consister à lisser le salaire sur la base de l’horaire hebdomadaire moyen et à décompter les heures supplémentaires en fin d’exercice ou au moment du départ du salarié, par rapport à la moyenne de 35 heures calculée exclusivement sur l’intervalle où il a été présent.

À défaut de précision dans l’accord, ce sont selon nous les règles concernant les absences d’origine non médicales qui s’appliquent (voir ci-dessus). Les heures correspondant aux périodes non travaillées, du fait du départ ou de l’entrée en cours d’année, ne doivent donc pas être déduites du seuil de déclenchement des heures supplémentaires.

En ce qui concerne, le cas échéant, la détermination du nombre de jours de repos auxquels peut prétendre le salarié, la question se pose dans les mêmes termes qu’en cas d’absence.

Sachez leBien que les dispositions de l’article L. 3121-41 du Code du travail précisent que constituent également des heures supplémentaires « les heures effectuées au-delà de la moyenne de 35 heures calculée sur la période de référence […] », ce mode alternatif de décompte des heures supplémentaires ne semble concerner que les organisations infra-annuelles et supra annuelles du temps de travail. Bien que d’ordre public, il ne vise pas, selon nous, le cas d’une année incomplète consécutive à un départ ou une entrée du salarié au cours d’un exercice annuel. Mais rien n’interdit d’adopter le même mécanisme dans l’accord collectif.

Quelle est l’incidence de droits à congés payés insuffisants ?

Tous les salariés n’ont pas toujours acquis, au cours de la période de référence, la totalité des jours de congés (légaux ou conventionnels) en particulier :

  • si la période d’acquisition des congés payés (en principe du 1er juin de l’année n au 31 mai de l’année n + 1) est différente de la période de référence pour le calcul de la durée annuelle de référence pour la modulation ;
  • si le salarié est entré ou sorti ou s’est absenté en cours de période de référence ;
  • si le salarié n’a pas pris la totalité des congés payés acquis.

L’insuffisance de droits à congés payés affecte principalement le décompte des heures supplémentaires. Dès lors qu’un salarié n’a pas un droit complet à congés payés, il peut être mécaniquement amené à effectuer plus de 1 607 heures de travail par an sans pour autant avoir travaillé plus de 35 heures en moyenne par semaine.

Dans ce cas, le seuil de 1 607 heures n’est pas pour autant augmenté à proportion des jours de congés payés non acquis. Il constitue toujours le seuil de déclenchement des heures supplémentaires (Cass. soc., 11 mai. 2016, no 14-29.512), lequel doit être, selon nous, identique pour l’ensemble de la collectivité de travail.

Sachez-le :L’arrêt du 11 mai 2016 confirme le caractère collectif et intangible du seuil annuel de déclenchement des heures supplémentaires. La Cour de cassation s’était déjà prononcée dans ce sens en ce qui concerne l’ancienne modulation du temps de travail (Cass. soc., 14 nov. 2013, no 11-17.644 à 11-17.647). Elle applique la même solution pour la nouvelle annualisation résultant de la loi no 2008-789 du 20 août 2008.

Il s’agissait dans cette affaire d’un salarié qui avait été embauché le 16 janvier 2013. Compte tenu du décalage entre la période d’acquisition et de prise des congés, il ne bénéficiait pas, pour l’année 2013, d’un droit complet à congés payés. De ce fait, il avait effectué 1 750,58 heures au cours de cet exercice, soit 143,58 heures au-delà du seuil de 1 607 heures. Pour la petite histoire, 15,98 heures lui avaient déjà été payées en décembre. Elles correspondaient sans doute à des dépassements ponctuels du plafond hebdomadaire.

Voulant sans doute éviter une telle « anomalie », l’accord d’aménagement et de réduction du temps de travail avait précisé que la durée annuelle de travail effectif d’un salarié engagé à temps plein n’est égale à 1 607 heures que pour les salariés « bénéficiant d’un droit à congés complets (30 jours ouvrables) ». Mais ces dispositions n’ont pas été prises en compte par le juge prud’homal dont la décision a été approuvée par les Hauts Magistrats : « Le conseil de prud’hommes qui énonce exactement que toute heure effectuée au-delà du plafond de 1 607 heures annuelles doit être considérée comme heure supplémentaire a, par ce seul motif et sans avoir à effectuer une recherche que ses constatations rendaient inopérante, motivé et légalement justifié sa décision. »

L’on peut certes regretter la formulation maladroite de l’accord collectif, lequel ne visait pas précisément les modalités de décompte des heures supplémentaires. Mais une rédaction plus subtile n’y aurait rien changé. L’accord collectif ne peut pas modifier la règle légale !

Cette solution a au moins le mérite de la clarté. Mais elle n’est pas très équitable dans la mesure où elle a pour effet d’accorder des majorations pour heures supplémentaires aux salariés qui ont travaillé selon le même rythme hebdomadaire que leurs collègues. Or, cette situation est également susceptible de se produire lorsqu’un collaborateur est absent, pendant un certain temps (sauf périodes assimilées à du temps de travail), au cours de la période d’acquisition des congés payés. Pour contourner cette situation, l’accord collectif est inopérant, car, sans le dire expressément, la Cour de cassation considère qu’il s’agit d’une règle d’ordre public. La seule exception concerne le report des congés payés d’une année sur l’autre (C. trav., art. L. 3141-22).

Selon nous, la solution consiste à faire coïncider la période de référence et de prise des congés payés avec l’exercice concerné par l’annualisation du temps de travail. Ce que le Code du travail n’interdit pas.

Une autre option peut consister à accorder un nombre de jours de repos équivalent pour ne pas dépasser 1 607 heures.

La Haute juridiction a confirmé sa position dans un arrêt du 7 mars 2018. Dans cette affaire, une entreprise appliquait un accord de modulation fixant la durée annuelle de travail à 1 607 heures. Plusieurs salariés, qui n’avaient pas acquis un droit à congés complet, ont été amenés à travailler au-delà de cette limite. Ils ont alors saisi la juridiction prud’homale pour obtenir le paiement d’heures supplémentaires. Selon les mêmes raisonnements et arguments que ceux développés ci-dessus, la Cour de cassation considère, de manière stricte, qu’en application des dispositions des articles L. 3122-9 et L. 3122-10 du Code du travail, dans leur rédaction applicable au litige, le seuil de déclenchement des heures supplémentaires ne peut pas être supérieur au plafond de 1 607 heures de travail par an (Cass. soc., 7 mars 2018, no 16-21.501 à 16-21.502).

Malgré les critiques pouvant être formulées à l’égard de cette position, les dispositions d’ordre public de l’article L. 3123-1 du Code du travail fixent la durée de travail annuelle à 1 607 heures sans que cette durée ne soit impactée par un droit à congé complet ou non.

Quel est l’impact sur le seuil annuel de déclenchement des heures supplémentaires d’un droit individuel à congés payés supérieur à celui des autres salariés ?

La durée annuelle étant collective, il semble qu’il n’y ait pas lieu de tenir compte des congés payés supplémentaires accordés à certains salariés.

Seuls doivent l’être ceux qui sont communs à l’ensemble de la collectivité de travail.

Les congés supplémentaires individuels doivent selon nous être traités comme des absences autorisées payées qui dispensent les salariés concernés de travailler pendant ces périodes. Il en résulte que les intéressés effectueront moins de 1 607 heures de travail par an s’ils ont travaillé en moyenne 35 heures par semaine hors périodes de congés payés. Ils n’ouvriront donc droit à des majorations pour heures supplémentaires que s’ils effectuent plus de 1 607 heures, et ce seuil sera de ce fait d’autant plus difficilement atteignable que leur nombre de congés payés supplémentaires sera important.

Dès lors que la durée annuelle et le seuil de 1 607 heures ont un caractère collectif, procéder autrement aurait pour effet de pervertir la philosophie du dispositif.

Quelles sont les obligations en matière d’affichage ?

Les heures auxquelles commence et finit le travail et leur répartition au cours de la période plurihebdomadaire doivent être affichées ainsi que les heures et la durée des repos (C. trav., art. L. 3171-1).

Voir aussi no 150-10.

Quelles sont les sanctions encourues ?

Quelles sont les sanctions civiles applicables ?

Les dispositions de l’accord qui ne sont pas conformes à l’article L. 3121-44 du Code du travail et aux règles d’ordre public du Code du travail peuvent faire l’objet, essentiellement à l’initiative des organisations syndicales, d’une action en nullité portée devant le tribunal de grande instance.

Elles sont par ailleurs inopposables aux salariés, lesquels sont dans ce cas notamment fondés à demander l’application des règles de droit commun, c’est-à-dire un décompte de la durée du travail dans un cadre hebdomadaire. Toutefois, cette irrégularité ne suffit pas pour établir, à elle seule, l’accomplissement d’heures supplémentaires (Cass. soc., 19 sept. 2012, no 11-22.782).

ObservationsÀ noter que lorsque l’accord collectif prévoit un seuil de déclenchement des heures supplémentaires supérieur à 1 607 heures, cela ne remet pas en cause la validité de cet accord. Si le salarié peut, dans ce cas, revendiquer le paiement en heures supplémentaires du temps de travail effectué au-delà de 1 607 heures, il ne peut pas se prévaloir d’un décompte hebdomadaire (Cass. soc., 17 déc. 2014, no 13-22.212).

L’inopposabilité des dispositions conventionnelles peut par exemple être invoquée lorsque l’accord ne répond pas à la condition de majorité imposée par la loi, ou lorsque les modalités d’aménagement qu’il prévoit ne respectent pas les règles fixées par le Code du travail.

Les mêmes effets s’appliquent lorsque l’aménagement du temps de travail n’est pas conforme aux dispositions fixées par l’accord collectif.

La Cour de cassation a par exemple jugé que lorsqu’un accord de branche prévoit que, en l’absence de délégués syndicaux ou de salariés mandatés, une modulation du temps de travail peut être appliquée directement après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, ou, en l’absence d’élus, « après information des salariés concernés », l’employeur doit, dans ce dernier cas, informer l’ensemble du personnel avant la mise en place de ce mode d’organisation. L’information des chefs d’équipe est insuffisante (Cass. soc., 6 mai 2009, no 07-40.235).

Le régime de droit commun des heures supplémentaires leur est dès lors applicable. En l’espèce, le salarié n’avait été informé qu’en sa qualité de « chef d’équipe ».

Ce qui vaut pour le défaut d’information des salariés prévue par la convention collective de branche vaut, selon nous, a fortiori, en cas d’absence de consultation des institutions représentatives du personnel.

Cette décision, prise au sujet de la modulation, est bien entendu transposable au nouveau mode d’organisation plurihebdomadaire du temps de travail, résultant de la loi no 2008-789 du 20 août 2008, ainsi qu’aux autres dispositifs, organisant le temps de travail en dehors du cadre hebdomadaire.

Quelles sont les sanctions pénales applicables ?

Aucune sanction pénale spécifique n’est à notre connaissance prévue en cas d’infraction aux dispositions de l’article L. 3121-44 du travail.

Ne sont envisagées que les infractions limitées au contingent, au décompte et aux contreparties des heures supplémentaires en les rendant passibles d’une amende prévue pour les contraventions de quatrième classe (C. trav., art. R. 3124-1 ; C. trav., art. R. 3124-2).

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