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140-14 Calcul de l’effectif en vue de la mise en place du CSE : comptabilisation des salariés

Partie 1 –
Présentation, mise en place et composition
Mise en place du CSE
Étude 140 –
Les entreprises qui doivent se doter d’un CSE
Section II –
Champ d’application du CSE : conditions d’effectifs
140-14 Calcul de l’effectif en vue de la mise en place du CSE : comptabilisation des salariés
Pour calculer l’effectif, les salariés de l’entreprise ou de l’établissement sont comptabilisés, mois par mois, selon des règles différentes variant en fonction de la nature ou de la durée de leur contrat de travail.

Les règles de décompte des effectifs sont fixées par le Code du travail pour déterminer si l’entreprise a atteint ou non les seuils conditionnant la mise en place d’institutions La jurisprudence est venue compléter les textes comme vous allez le voir. Bien que rendue sous l’empire du CE elle s’applique aussi au CSE.

Il est à noter que certaines personnes sont exclues du décompte (voir no 140-14).

Le tribunal d’instance est compétent en cas de contentieux sur la détermination de l’effectif (Cass. soc., 21 janv. 1981, no 80.60.274, Bull. civ. V, no 47).

a) Salariés à prendre en compte intégralement dans l’effectif de l’entreprise

Selon l’article L. 1111-2 du Code du travail, sont intégralement pris en compte (c’est-à-dire qu’un salarié vaut une unité dans le décompte) :

  • —  les salariés sous contrat à durée indéterminée à temps plein ;
  • —  les salariés en forfaits jours même s’ils sont employés sur la base d’un forfait inférieur au plafond légal ou conventionnel (Circ. DRT no 2000-07, 6 déc. 2000, point 21) ;
  • —  les travailleurs à domicile, même s’ils travaillent pour plusieurs employeurs et font ainsi partie de l’effectif de plusieurs entreprises ;
  • —  les salariés dispensés d’activité qui continuent de percevoir une garantie de ressources financée par l’entreprise (Cass. soc., 26 mai 2004, no 03-60.125, Bull. civ. V, no 140 : il s’agissait dans cette affaire de salariés en préretraite conventionnelle financée par l’entreprise) ;
  • —  les salariés dont le contrat de travail est suspendu quels que soient le motif et la durée de la suspension, les salariés qui se trouvent en situation de préavis, travaillé ou non, ainsi que les salariés en chômage partiel ;
  • —  les salariés en période d’essai liés par un contrat de travail à durée indéterminée ;
  • —  les travailleurs handicapés employés à temps plein dans des entreprises, des ateliers protégés, ou des centres de distribution de travail à domicile ;
    • les cadres détenant sur un service, un département ou un établissement de l’entreprise, une délégation particulière d’autorité établie par écrit permettant de les assimiler à un chef d’entreprise (Cass. soc., 26 sept. 2002, no 01-60.670, Bull. civ. V, no 285) ; à noter les dirigeants non salariés ne sont pas comptés dans les effectifs.

Sont également pris en compte intégralement :

  • —  les concierges d’immeuble employés par une société immobilière ;
  • —  les enseignants du secteur privé qui effectuent un temps complet.

Sont aussi comptabilisés pour une unité les VRP, voyageurs représentants placiers, exclusifs ou multicartes (sauf travail à temps partiel, voir ci-dessous).

Les agents publics, mis à la disposition d’un organisme de droit privé pour accomplir un travail pour le compte de celui-ci et sous sa direction sont liés à cet organisme par un contrat de travail, sauf dispositions législatives contraires, et ne relèvent donc pas des dispositions spécifiques relatives à l’électorat et à l’éligibilité des salariés mis à disposition. De ce fait, ils sont pris en compte dans le calcul de l’effectif salarié de l’entreprise d’accueil (Cass. soc., 17 avr. 2013, no 12-21.581).

Les salariés exécutant leur contrat de travail à l’étranger, dès lors qu’ils ont été recrutés en France, doivent être inclus dans les effectifs de l’établissement français, en vue des élections (Cass. soc., 4 mai 1994, no 91-60.008, Bull. civ. V, no 162).

En revanche, si une société française recrute des salariés à l’étranger pour qu’ils y exercent définitivement et exclusivement leurs activités, ces derniers sont exclus de l’effectif et de l’électorat (Cass. soc., 5 déc. 2000, no 99-60.318).

b) Salariés à temps partiel : prise en compte au prorata de leur durée de travail hebdomadaire, mensuelle ou annuelle

Les salariés à temps partiel dont nous parlons ici sont ceux qui sont titulaires d’un contrat à durée indéterminée et dont la durée de travail est inférieure à la durée de travail normale en vigueur dans l’entreprise (la durée légale ou conventionnelle de travail dans l’entreprise).

Pour ces salariés, l’effectif est calculé en divisant la somme totale des horaires inscrits dans leurs contrats de travail par la durée de travail calculée sur la base de la durée légale de travail ou de la durée conventionnelle (C. trav., art. L. 1111-2, 3).

La circulaire DRT no 13 du 25 octobre 1983 (JONC 20 déc.) transposable au CSE donne les exemples suivants :

EXEMPLE

1. Trois salariés titulaires d’un CDI, dans une entreprise, et travaillant 15 heures par semaine, comptent pour 1,29 (15 heures × 3/35)

2. Dans une entreprise employant 47 salariés travaillant à temps complet (soit un horaire conventionnel de 38 heures par semaine) ; 8 salariés travaillent à temps partiel dont :

  • —  5 sur la base de 22 heures par semaine ;
  • —  3 sur la base de 15 heures par semaine.

Les derniers, comptent pour (22 × 5) + (15 × 3) / 38 = 4,07 salariés.

En l’espèce l’effectif global atteint est de 51 salariés (47 CDI + 4,07 salariés temps partiel).

3. Salariés travaillant pour plusieurs employeurs :

Un salarié travaillant régulièrement dans deux ou plusieurs entreprises est pris en compte dans l’effectif de chacune d’elles au prorata du temps qu’il leur consacre.

Ne seront comptabilisés de cette façon que les salariés dont la preuve du temps partiel aura été apportée (le plus souvent par l’existence d’un contrat de travail écrit précisant les horaires à temps partiel).

EXEMPLE

Par exemple, une société employait des salariés payés à la tâche pour distribuer des prospectus dans les boîtes aux lettres. Elle entendait les comptabiliser comme salariés à temps partiel alors que les contrats de travail ne comportaient aucune indication d’horaire. La Cour de cassation rejette cette prétention au motif qu’aucun élément de preuve du travail à temps partiel n’avait été produit devant le tribunal et ne pouvait faire échec à la présomption que les contrats de travail étaient conclus pour un horaire normal (Cass. soc., 1er mars 2000, no 98-60.453).

Les salariés en forfaits jours même s’ils sont employés sur la base d’un forfait inférieur au plafond légal ou conventionnel ne sont pas des salariés à temps partiel (Circ. DRT no 2000-07, 6 déc. 2000, point 21).

Les voyageurs représentants placiers (VRP) multicartes, qui par essence travaillent pour plusieurs employeurs, ne sont pas considérés comme automatiquement à temps partiel (Cass. soc., 7 oct. 1998, no 97-60.429, Bull. civ. V, no 415). Pour être considéré comme salarié à temps partiel, il faudra apporter la preuve de l’emploi à temps partiel (le plus souvent par l’existence d’un contrat de travail écrit qui préciserait les horaires effectués par le VRP multicartes).

RemarquesPour les salariés à temps partiel sous CDD, il convient d’appliquer à la fois la règle du prorata de l’horaire de travail et celle du temps de présence exposée ci-après.

Dans le cadre d’une contestation sur les effectifs à retenir et, notamment, sur la prise en compte ou non de salariés en tant que travailleurs à temps partiel, c’est à l’employeur de rapporter la preuve de la conclusion de contrats de travail à temps partiel et du temps de travail accompli par ces salariés. En l’absence de ces éléments, le tribunal d’instance n’a pas à rechercher si les salariés en question étaient ou non à temps partiel (Cass. soc., 20 mars 2002, no 00-60.392).

c) Salariés pris en compte au prorata de leur temps de présence dans l’entreprise au cours des 12 mois précédents

Ces salariés sont pris en compte en fonction de leur temps de présence sur les 12 mois précédents.

Il s’agit (C. trav., art. L. 1111-2) :

  • —  des salariés sous contrat à durée déterminée (CDD) ;
  • —  des travailleurs temporaires ;
  • —  des travailleurs mis à la disposition de l’entreprise par une entreprise extérieure sous certaines réserves (voir ci-après) ;
  • —  des salariés sous contrat de travail intermittent.

1. Salariés sous contrat à durée déterminée (CDD)

EXEMPLE

La circulaire DRT no 13 du 25 octobre 1983 (JO 20 déc.) prise sous l’empire du CE mais applicable au CSE donne l’exemple suivant :

  • —  3 salariés sous CDD de 3 mois, d’octobre à décembre ;
  • —  1 salarié sous CDD de 6 mois, de juillet à décembre ;
  • —  1 salarié sous CDD de 9 mois.

Ces 5 salariés seront pris en compte comme suit :

(3 × 3) + (1 × 6) + (1 × 9) / 12 = 24/12 = 2 unités.

Ces 5 salariés comptent donc pour 2 salariés.

Pour les salariés à temps partiel sous CDD, il convient d’appliquer à la fois la règle du prorata du temps de présence et celle du prorata de l’horaire de travail.

EXEMPLE

Un salarié en CDD ayant travaillé 6 mois sur les 12 derniers mois à 22 heures par semaine compte pour : (6 mois / 12 mois) × (22 h / 35 h) = 0,31

Toutefois, les salariés remplaçant un salarié absent ou dont le contrat de travail est suspendu ne sont pas pris en compte.

2. Travailleurs temporaires

Bien que leur employeur ne soit pas l’entreprise utilisatrice, les travailleurs intérimaires y sont pris en compte au prorata de leur temps de présence au cours des 12 mois précédents (par exemple Cass. soc., 28 févr. 2007, no 06-60.171).

Toutefois, les salariés remplaçant un salarié absent ou dont le contrat de travail est suspendu ne sont pas pris en compte.

RemarquesLes travailleurs intérimaires sont aussi pris en compte dans le calcul de l’effectif de leur entreprise de travail temporaire dès lors qu’ils lui ont été liés par contrat de travail temporaire pendant une durée totale de 3 mois au cours de la dernière année civile (C. trav., art. L. 1251-54). Ils comptent alors pour une unité (pas de proratisation).

3. Salariés sous contrat de travail intermittent

Les contrats de travail intermittent (contrats prévoyant une alternance de périodes travaillées et non travaillées) sont pris en compte dans le calcul de l’effectif au prorata de leur temps de présence dans l’entreprise (C. trav., art. L. 3123-31 à C. trav., art. L. 3123-37).

4. Salariés entrés ou sortis en cours de mois

Les textes ne donnent pas de règles de décompte des mois partiellement travaillés. Il faut donc opter pour une méthode de calcul permettant de prendre ces périodes travaillées en compte au prorata (soit en heures, soit en jours) et la respecter pour tous les salariés concernés. Cette règle peut à notre avis faire l’objet d’un accord collectif ou être traitée dans l’accord préélectoral.

d) Cas particulier : travailleurs mis à la disposition de l’entreprise par une entreprise extérieure

Les salariés mis à disposition ont toujours suscité de nombreux débats concernant leur prise en compte dans l’effectif de l’entreprise où ils travaillent.

Les salariés mis à la disposition, par une entreprise extérieure, sont comptés :

  • —  dans l’entreprise qui les emploie (leur employeur d’origine) de manière « classique » ;
  • —  et ils doivent de plus être pris en compte dans le calcul d’effectif de l’entreprise utilisatrice à une double condition : ces salariés doivent « être présents dans les locaux de l’entreprise utilisatrice et y travailler depuis au moins un an », ces deux conditions étant cumulatives (C. trav., art. L. 1111-2, 2o, mod.).

Ainsi la Cour de cassation a jugé, à propos des salariés mis à disposition qui travaillaient indifféremment pour plusieurs transporteurs et ne se rendaient que ponctuellement dans les locaux de la société utilisatrice, qu’ils ne pouvaient pas être pris en compte dans l’effectif pour les élections de cette dernière car ils ne remplissaient pas les deux conditions cumulatives (Cass. soc., 14 avr. 2010, no 09-60.367).

Par ailleurs, les salariés mis à disposition d’une entreprise qui ont choisi de ne pas voter dans celle-ci mais dans leur entreprise d’origine car ils en ont le choix, ne sont pas pour autant exclus du décompte des effectifs de l’entreprise utilisatrice dès lors qu’ils remplissent les conditions prévues par l’article L. 1111-2 du Code du travail. Dans cette affaire, l’entreprise était composée de 8 salariés permanents et 6 salariés mis à disposition dont 5 remplissaient les conditions de prise en compte dans les effectifs. Estimant que le seuil des 11 salariés était atteint, un syndicat réclamait l’organisation des élections des délégués du personnel. Afin de faire échec à la prise en compte de ces salariés, l’employeur soutenait que 4 d’entre eux avaient indiqué par écrit vouloir voter pour les institutions représentative de leurs employeurs d’origine et que de ce fait ils n’avaient pas à être comptés dans l’effectif. Cette position n’est pas suivie par les juges car la question de la prise en compte dans l’effectif et celle du lieu d’exercice des droits de vote sont indépendantes (Cass. soc., 19 janv. 2011, no 10-60.296).

Attention : la loi n’exige pas ici une présence continue de 12 mois, ce qui veut dire que la condition d’un an peut s’apprécier sur plusieurs années de travail. Autrement dit, si un salarié mis à disposition est intervenu à plusieurs reprises au sein d’une entreprise, il faudra prendre en compte la durée de ses différentes missions pour vérifier si la condition de travail d’un an est remplie et si c’est le cas et qu’il est encore dans les locaux, l’intégrer dans les effectifs.

Conclusion : un salarié mis à disposition qui, au bout d’un an, est toujours présent dans les locaux de l’entreprise d’accueil devra être pris en compte dans le calcul de l’effectif, tout comme celui qui exécute plusieurs missions au sein d’une entreprise d’accueil, totalisant un an de travail.

En revanche, ces salariés restent exclus du décompte des effectifs lorsqu’ils remplacent un salarié dont le contrat est suspendu (C. trav., art. L. 1111-2).

RemarquesAttention à ne pas confondre ces règles de prise en compte des salariés mis à disposition dans l’effectif de l’entreprise d’accueil avec celles qui s’appliquent en matière de droit de vote et d’éligibilité aux élections professionnelles et qui sont tout à fait différentes (voir no 143).

e) Cas particulier : pigistes, vacataires

Certains statuts salariaux sont très particuliers. Il en va ainsi des pigistes, qui sont des salariés rémunérés à la pige (à l’article en quelque sorte) et qui ne peuvent guère être comptés en fonction de leur temps de présence dans l’entreprise. Selon la jurisprudence, leur prise en compte peut alors être basée sur le montant de leurs rémunérations brutes (Cass. soc., 10 mai 2006, no 05-60.268, Bull. civ. V, no 175 : le nombre de pigistes a été calculé en divisant leurs rémunérations moyennes par le salaire minimum de croissance qui leur était également applicable, après avoir constaté qu’aucun barème obligatoire de rémunération des piges n’était applicable).

Le mode de calcul des salariés à statut particulier peut être précisé par accord collectif. Par exemple, la CCN (Convention Collective Nationale) des prestataires de services dans le domaine tertiaire sur l’animation commerciale prévoit que les animateurs qui y sont employés sous contrat à durée déterminée sont comptés dans les effectifs « en effectuant un rapport entre la masse des salaires bruts perçus, hors indemnité de précarité, par l’ensemble des animateurs pendant les 12 mois précédant la date des élections et le salaire brut théorique correspondant à un travail annuel à temps complet ».

Autres cas particuliers, les « vacataires » qui sont employés dans certains domaines à des activités ponctuelles (par exemple dans l’enseignement, dans l’animation, le tourisme). Ces salariés spécifiques sont, selon les conventions collectives, considérés et comptés comme des salariés sous contrat à durée déterminée ou comme des travailleurs sous contrat de travail intermittent.

RemarquesAvant tout calcul des effectifs, il faut relire les conventions ou les accords collectifs applicables dans l’entreprise afin de vérifier s’ils contiennent des règles spécifiques. Lorsqu’ils ne prévoient rien, les règles de prise en compte des cas particuliers devront être négociées par les employeurs et les syndicats (par exemple lors de la négociation du protocole préélectoral).

f) Cas particulier : entreprise de portage salarial

Pour calculer les effectifs d’une entreprise de portage salarial, il est tenu compte :

  • des salariés permanents fonctionnels de cette entreprise, déterminés conformément à l’article L. 1111-2 du Code du travail ;
  • des salariés portés qui ont effectué des prestations de portage salarial dans le cadre de contrats de travail conclus avec cette entreprise pendant une durée d’au moins trois mois au cours de la dernière année civile (C. trav., art. L. 1254-29 créé par Ord. no 2015-380, 02 avr. 2015, JO du 03 ; C. trav., art. L. 1111-2).

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