Textes :CSS, art. L. 114-13 ; CSS, art L. 162-1-14 ; CSS, art. L. 441-2 ; CSS, art. L. 471-1 ; CSS, art. R. 441-3 ; CSS, art. R. 441-11 ; CSS, art. R. 471-3 ; D. nº 2019-356, 23 avr. 2019, JO 25 avr.
◗ Sur qui pèse l’obligation de déclarer les accidents du travail ?
Principe. — L’obligation de déclarer tout accident du travail dont il a connaissance incombe à l’employeur qui ne peut s’en exonérer (CSS, art. L. 441-2). Il ne peut pas, par exemple, se contenter de remettre à la victime une feuille d’accident portant désignation de la caisse primaire compétente. Cette déclaration est obligatoire quelle que soit l’opinion de l’employeur sur les causes exactes de l’accident (Cass. soc., 15 nov. 2001, nº 99-21.638).
L’employeur doit aussi déclarer, dans les mêmes conditions, les accidents de trajet, même s’il n’a aucune possibilité de vérifier la matérialité de l’accident. Il lui appartient alors d’assortir sa déclaration des réserves (voir ci-après) qu’il estime utiles (Lettre min., 11 mars 1968, Bull. jur. UCANSS 68-33).
En revanche, pour les maladies professionnelles et dans le cas de rechute d’accident ou de maladie, ce n’est pas à l’employeur mais à la victime elle-même qu’il incombe d’effectuer la déclaration (voir ci-après et nº 105-105).
Remarque :certaines entreprises peuvent être autorisées par la Carsat à inscrire sur un registre spécial les accidents bénins (c’est-à-dire n’entraînant ni arrêt de travail ni consultation médicale), dans des conditions strictement définies par la réglementation (voir nº 105-120). Dans ce cas, l’employeur est dispensé de déclarer ces accidents à la CPAM.
Cas particuliers. — L’employeur qui a recours à des salariés intérimaires n’a l’obligation, en cas d’accident, que de porter à la connaissance de l’entreprise de travail temporaire les accidents de travail survenus aux salariés mis à sa disposition (voir nº 105-120). La déclaration à la CPAM incombe à l’entreprise de travail temporaire.
Lorsque l’accident concerne un élève ou étudiant d’un établissement d’enseignement effectuant un stage en entreprise (voir nº 105-115), l’obligation de déclaration de l’accident du travail incombe à l’entreprise dans laquelle le stage est effectué. Celle-ci doit adresser sans délai à l’établissement d’enseignement dont relève l’élève ou l’étudiant copie de la déclaration d’accident du travail envoyée à la CPAM compétente (CSS, art. R. 412-4).
Si le salarié accidenté travaille à domicile pour plusieurs employeurs, la déclaration doit être effectuée par l’employeur pour le compte duquel il travaillait au moment de l’accident (Circ. nº 88 SS, 9 juin 1952).
ATTENTION :si l’employeur ne le fait pas, le salarié est admis à déclarer lui-même l’accident dont il a été victime (voir ci-après).
◗ Sous quelle forme et dans quel délai la déclaration doit-elle être faite ?
La déclaration de l’employeur doit être faite auprès de la caisse primaire d’assurance maladie du lieu de résidence de la victime par lettre recommandée avec avis de réception, dans les 48 heures suivant l’accident (CSS, art. R. 441-3).
Imprimé de déclaration. — L’employeur doit déclarer l’accident au moyen d’un imprimé-type à plusieurs volets. Les trois premiers volets sont adressés à la caisse primaire qui en fait parvenir un à l’inspecteur du travail et un à la Carsat, l’employeur conservant le quatrième. La déclaration peut aussi être faite par Internet (www.net-entreprises.fr).
Attestation de salaire en cas d’arrêt de travail. — En même temps que la déclaration d’accident ou au moment de l’arrêt du travail si celui-ci est postérieur, l’employeur adresse à la CPAM une attestation indiquant la période de travail, le nombre de journées et d’heures auquel s’appliquent la ou les payes, leur montant et leur date. Ces indications serviront au calcul des indemnités journalières qui seront servies à la victime.
Remarque :les différents formulaires peuvent être obtenus auprès des CPAM ou sur Internet : www.ameli.fr.
Délai d’envoi de la déclaration. — La déclaration doit être envoyée dans les 48 heures suivant l’accident (non compris les dimanches et jours fériés).
Pour certains salariés travaillant hors des locaux de l’établissement (sont notamment visés les travailleurs à domicile et les VRP), ce délai ne commence à courir que du jour où l’employeur a été informé de l’accident (CSS, art. R. 441-3). Cette solution a été étendue par la jurisprudence à toutes les hypothèses où l’employeur n’a pas immédiatement connaissance de l’accident (Cass. 2ème civ., 4 nov. 2003, nº 02-30.319 ; Cass. 2ème civ., 9 déc. 2003, nº 02-30.603). Jugé, par exemple, qu’il ne peut pas être reproché à un employeur d’avoir fait une déclaration tardive alors qu’il n’avait eu connaissance de ce qu’un salarié qualifiait d’accident du travail son état dépressif apparu à l’annonce de son licenciement, que lorsque ce dernier avait engagé une action en ce sens (Cass. 2ème civ., 17 janv. 2008, nº 06-21.556).
En revanche, l’employeur n’est pas admis à invoquer une erreur d’appréciation quant à la gravité des lésions pour justifier le retard apporté à la déclaration (Cass. soc., 4 juin 1970, nº 69-12.322).
À noter également que lorsque l’accident s’est produit sur le lieu de travail, en présence d’un préposé de l’employeur, l’accident est réputé immédiatement connu de l’employeur.
ATTENTION :les employeurs doivent conserver pendant cinq ans une copie des déclarations d’accidents de travail (C. trav., art. D. 4711-3).
◗ L’employeur peut-il émettre des réserves sur le caractère professionnel de l’accident ?
Oui, si l’employeur doute que l’accident soit un accident du travail, il peut porter sur la déclaration les réserves qu’il juge opportunes (CSS, art. R. 441-11). Lorsque l’employeur émet des réserves, cela oblige la caisse, avant toute décision, à envoyer à l’employeur et à la victime un questionnaire sur les circonstances ou la cause de l’accident ou de la maladie ou à procéder à une enquête auprès des intéressés. Une enquête est obligatoire en cas de décès (CSS, art. R. 441-11). Cette obligation d’instruire le dossier s’accompagne de l’obligation pour la caisse de respecter le principe du contradictoire (voir nº 105-135).
Les réserves doivent être motivées (CSS, art. R. 441-11). Cette précision, qui résulte du décret du 29 juillet 2009, entérine la jurisprudence qui exigeait déjà que les réserves soient précises et détaillées (Cass. 2ème civ., 17 févr. 2011, nº 10-15.276).
ATTENTION :motiver n’est pas prouver. Ainsi, les réserves formulées par l’employeur qui relevaient l’absence de témoins à l’accident et l’absence de déclaration de l’accident par le salarié à l’employeur le jour supposé de sa survenue, doivent être considérées comme motivées. En effet, « l’exigence de réserves motivées (…) ne saurait être interprétée comme imposant à l’employeur de rapporter, à ce stade de la procédure, la preuve des faits de nature à démontrer que l’accident n’a pas pu se produire au temps et au lieu de travail »
. Dès lors, la caisse n’a pas à exiger de l’employeur qu’il dise en quoi les circonstances de temps et de lieu de l’accident étaient inexactes et qu’il mentionne les éléments propres à établir cette inexactitude (Cass. 2ème civ., 23 janv. 2014, nº 12-35.005).
Toujours selon la jurisprudence, les réserves émises par l’employeur ne peuvent porter que sur les circonstances de temps et de lieu de l’accident ou l’existence d’une cause étrangère au travail (Cass. 2ème civ., 1er déc. 2011, nº 10-26.590 ; Cass. 2ème civ., 10 oct. 2013, nº 12-25.782). Par conséquent, ne constituent pas des réserves valables :
L’employeur qui n’a pas formulé de réserves dans sa déclaration se prive-t-il de toute possibilité de contester par la suite le caractère professionnel de l’accident ? Non. L’absence de réserves dans la déclaration ne vaut pas reconnaissance tacite du caractère professionnel de l’accident et ne prive pas l’employeur de la possibilité de contester par la suite le caractère professionnel de l’accident (Cass. 2ème civ., 19 juin 2008, nº 07-12.770). Toutefois, l’absence de réserves portant sur les circonstances de l’accident (temps et lieu) signifie que l’employeur admet implicitement que l’accident s’est produit au temps et au lieu du travail (Cass. 2ème civ., 8 janv. 2009, nº 07-15.390). Il lui est donc très difficile de revenir par la suite sur ces éléments matériels (Cass. 2ème civ., 25 juin 2009, nº 08-17.155 ; Cass. 2ème civ., 4 févr. 2010, nº 09-10.584).
Remarque :à compter du 1er décembre 2019, l’employeur aura un délai de 10 jours francs pour faire part à la caisse d’assurance maladie de ses réserves sur le caractère professionnel d’un accident déclaré par un salarié (D. nº 2019-356, 23 avr. 2019, JO 25 avr.).
◗ Que risque l’employeur qui n’a pas déclaré conformément à la loi un accident du travail ?
Sanctions pénales. — L’employeur qui n’a pas respecté son obligation de déclarer dans les 48 heures un accident du travail est passible de sanction pénale (amende de 750 € pour une personne physique, 3 750 € pour une personne morale) (CSS, art. R. 471-3).
Par ailleurs, toute déclaration frauduleuse qui vise à obtenir, faire obtenir ou tenter de faire obtenir des organismes de protection sociale des prestations ou des allocations qui ne sont pas dues, il est passible d’une amende. Ainsi, la fausse déclaration ou la déclaration incomplète est punie de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros (C. pén., art. 441-6). En outre, lorsqu’une escroquerie est réalisée au préjudice d’un organisme de protection sociale pour l’obtention d’une prestation indue, la peine est portée à sept ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende (C. pén., art. 313-2).
Pénalité administrative. — L’employeur peut également se voir appliquer une pénalité administrative (CSS, art. L. 162-1-14 ; CSS, art. R. 147-1 et s. ; D. nº 2013-6, 3 janv. 2013, JO 5 janv.) en cas de :
Le montant de la pénalité est fixé en fonction de la gravité des faits reprochés, soit proportionnellement aux sommes concernées dans la limite de 50 % de celles-ci, soit, à défaut, forfaitairement dans la limite de deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale.
Remboursement des dépenses engagées. — En outre, l’employeur s’expose, notamment en cas de déclaration tardive, à devoir rembourser à la CPAM la totalité des dépenses exposées à la suite de l’accident (CSS, art. L. 471-1).
C’est à l’employeur qu’il incombe de rapporter la preuve qu’il a fait la déclaration dans le délai prescrit (Cass. soc., 25 avr. 1979, nº 77-14.415). L’envoi en recommandé facilite cette preuve.
Toutefois, s’agissant du remboursement à la CPAM des dépenses occasionnées par l’accident (CSS, art. L. 471-1), il appartient aux juridictions du contentieux général de la sécurité sociale d’apprécier l’adéquation de la sanction à la gravité de l’infraction commise (Cass. 2ème civ., 8 avr. 2010, nº 09-11.232). La sanction a ainsi pu être écartée dans les cas suivants :
◗ Le salarié peut-il déclarer lui-même son accident à la caisse primaire d’assurance maladie ?
Accident du travail. — Si l’employeur n’a pas satisfait à son obligation de déclaration, la victime peut déclarer elle-même l’accident afin de sauvegarder ses droits (CSS, art. L. 441-2). La déclaration est faite par la victime (ou ses ayants droit) à la caisse primaire d’assurance maladie de son lieu de résidence. Même si cette déclaration n’est soumise à aucune forme réglementaire (Cass. 2ème civ., 2 mai 2007, nº 05-21.691 ; Cass. 2ème civ., 16 juin 2011, nº 10-20.252), il est vivement conseillé de la faire par lettre recommandée avec avis de réception car elle a pour effet d’interrompre la prescription et de faire courir le délai imparti à la caisse pour se prononcer sur la prise en charge (voir ci-après).
En effet, pour que les droits de l’assuré soient sauvegardés, cette déclaration doit impérativement être faite avant l’expiration de la deuxième année suivant l’accident ; ce délai de deux ans correspond au délai de prescription des accidents du travail (CSS, art. L. 441-2). Il faut toutefois préciser qu’en cas d’apparition tardive d’une lésion (voir nº 105-80), le point de départ du délai est fixé à la date de la révélation à la victime de la pathologie dont elle est atteinte (Cass. 2ème civ., 22 mars 2005, nº 03-30.551 ; Cass. 2ème civ., 2 mai 2007, nº 06-13.625).
Rechute. — Dans le cas de rechute d’un accident du travail antérieur, c’est au salarié qu’il incombe d’en effectuer la déclaration en fournissant à la caisse tous les justificatifs médicaux nécessaires (CSS, art. R. 443-4). Il en va de même en cas de maladie professionnelle ou de rechute de maladie professionnelle (voir nº 105-130).
Remarque :la déclaration de l’assuré est importante car même si elle intervient tardivement, dès lors qu’elle est faite dans les deux ans qui suivent l’accident, elle fait courir le délai dont la caisse dispose pour contester le caractère professionnel de l’accident ; par conséquent, à défaut de contestation dans ce délai (actuellement fixé à 30 jours par l’article R. 441-10 du Code de la sécurité sociale), le caractère professionnel de l’accident doit être considéré comme établi à l’égard de la victime (Cass. 2ème civ., 27 janv. 2004, nº 02-30.423 ; voir nº 105-135).
La déclaration de l’assuré pouvant faire grief à l’employeur, lorsque la caisse la reçoit, elle est tenue d’en envoyer un double à l’employeur par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception (CSS, art. R. 441-11). En revanche, elle n’est pas tenue de lui adresser également le certificat médical (Cass. 2ème civ., 2 avr. 2009, nº 07-21.422). Elle doit aussi informer l’employeur du point de départ du délai d’instruction de cette demande de prise en charge (Circ. CNAMTS nº 99/18, 20 mai 1999). La caisse adresse également un double de la déclaration au médecin du travail.
Ainsi informé, l’employeur peut émettre des réserves motivées. L’article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale lui en reconnaît le droit :
Les réserves motivées de la part de l’employeur obligent la caisse à procéder à une enquête avant de prendre sa décision (voir ci-avant).
Sachez-le :en l’absence de toute déclaration d’accident, la victime peut obtenir des tribunaux le versement par l’employeur de dommages et intérêts en engageant sa responsabilité civile de droit commun. C’est ce qui a été jugé dans une affaire où le salarié avait été victime au temps et au lieu du travail d’un malaise cardiaque en apprenant sa mutation. Ce malaise n’avait pas été déclaré par l’employeur comme accident du travail, et le salarié n’avait formé que tardivement une demande de prise en charge qui fut rejetée. L’employeur a été condamné à verser au salarié des dommages et intérêts, les juges ayant estimé que son omission fautive d’effectuer la déclaration qui lui incombait, avait privé la victime d’une chance de se voir reconnaître le bénéfice des prestations prévues par la législation professionnelle, peu important que l’intéressé n’ait pas fait usage dans le délai légal de la faculté qui lui était offerte d’effectuer lui-même la déclaration (Cass. soc., 15 nov. 2001, nº 99-21.638).
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